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                            EN ALLEMAGNE.                        225

    se pressent dans son esprit, les émotions les plus variées se.
    partagent son ame, et, semblable à la Pythie, il ne peut s'em
    pêcher d'obéir au dieu qui le pousse, et d'émettre dans une
    parole éloquente le flot dépensées dont il est oppressé. Ce ne
    sont pas des développements lents et graduels; ce n'est pas
    une série d'idées dont l'ordre est logiquement combiné; c'est
    une abondance presque désordonnée qui par mille détours
    arrive au but, peut-être sans convaincre votre raison, mais
    non sans enrichir votre esprit d'une foule d'idées nouvelles, et
    sans gagner votre cœur pour l'orateur. La logique de Hegel
    pourrait se comparer à l'un de ces jardins somptueusement
    alignés dans le goût de la Renaissance, où les arbres mêmes,
    taillés avec art, ont dû se plier, malgré eux, à la volonté du pos-
    sesseur. Libres comme la nature, les développements de Stef-
    fens ressemblent aux forêts primitives du nouveau monde. 11
    n'y a là ni route frayée, ni symétrie bien calculée. Mais vous
    vous trouvez sous l'influence magique d'un esprit grandiose,
    vous entrevoyez des pensées divines, et vous sentez un souffle
    de vie que vous n'avez pas trouvé dans le parallélisme des sen-
    tiers de votre jardin.
       Tout ce que nous venons de dire sur Steffens s'applique
    en particulier à son principal ouvrage, à sa Philosophie de la
    Religion. Comme la religion et la nature ne sont qu'un pour
    l'auteur, et que Steffens aime â voir la manifestation de Dieu
    dans les merveilles de la création, il se trouve dans ce livre
    un nombre infini de digressions sur les mystères de l'uni-
    vers. L'auteur dévoile les uns, effleure la solution des autres,
    mais trace toujours d'intéressants parallèles, et fait partout de
    curieux rapprochements entre la nature et la piété considé-
    rées comme les deux sanctuaires du Très-Haut. Le système
    de la pensée absolue mérite, selon Steffens, un blâme absolu,
    parce qu'en jetant indistinctement toutes les idées dans le
    moule d'une classification abstraite, il ne laisse à rien son
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