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222 DE L'ÉTAT ACTUEL DE LA PHILOSOPHIE rience; il a dégagé le titre d'empiriste de la honte traditio- nelle qui pesait sur lui, surtout depuis le commencement de notre siècle. Il a délruit le préjugé qui ne voyait de philoso- phie et de science que dans la ridicule prétention à un aprio- risme absolu. D'autres viendront secouer plus complètement encore ce joug dangereux, et ruiner entièrement dans leurs bases imaginaires les théories fantastiques de « l'innéité » des sciences. D'autres encore montreront que, dépassant les limi- tes dans un sens opposé à celui de la logique transcendante, Schelling a eu tort de compter la révélation positive parmi les sources où doit puiser un empirisme philosophique. Le phi- losophe de Munich aura toujours la gloire d'avoir fait une large part à l'observation externe et interne, dans un temps où le nom même d'observation était proscrit de la philoso- phie. Le théisme l'était presque tout autant au moment où Schelling a repris la parole; il faut donc encore savoir gré à ce philosophe d'avoir pris en main la défense de celui qui est la source de l'être, et d'avoir vivement réclamé en faveur des droits d'un Dieu qu'il ne juge pas même nécessaire d'ap- peler personnel, parce que, dit-il, un Dieu non personnel est impossible. Il faut reconnaître qu'il a bien mérité de la phi- losophie en revenant, sinon avec une clarté suffisante, au moins avec une grande énergie à l'idée de la transcendance de la divinité, malgré le concert de sarcasmes dont on avait coutume dans le monde philosophique de saluer celui qui avait assez de jugement pour ne pas identifier cetle idée avec celle de l'immanence de Dieu dans l'univers. Enfin, par suite même de la confusion que les systèmes logiques avaient habilement dû jeter dans les esprits, et grâce à laquelle ils étaient parvenu à proclamer l'identité de tous les contraires, la liberté humaine aussi avait été engloutie dans la nuit universelle, et proclamée synonyme drt la nécessité à la