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                  EXPOSITION    1844-1845.                   07
au temps de Boucher, cette manière eût paru peut-être
sévère, mais après David, elle paraît ce qu'elle est, molle
et vulgaire. M. Dubufe est un artiste fort adroit, a qui la na-
ture a départi un sentiment de grâce peu commun. Malheu-
reusement quelques succès de boudoir sont venus le prendre au
milieu d'une carrière consciencieuse, el l'ont pour toujours
éloigné du bon chemin. Le propre des portraits de cet artiste
est de se ressembler tous; il en produirait mille, qu'ils pré-
senteraient le même degré de mérite; celui qu'il a envoyé
à notre salon, est précisément comme tous ceux de toutes les
femmes qu'il a peintes jusqu'ici. Ce sont toujours des créa-
tions vaporeuses impossibles, arrangées, posées avec un goût
merveilleux. Tourmenté de la crainte de trop exprimer le
modelé de ses figures, M. Dubufe néglige complètement
 toute science anatomique; soupçonnerait-on jamais autre
chose qu'un mannequin sous ce charmant ajustement?On
cherche le sang, la chair, la vie, on trouve l'huile du pein-
tre et son pinceau si gracieusement faux. Après tout, M. Du^
bufe est très pardonnable de continuer sa réputation par les
 moyens qui l'ont commencée ; lorsqu'il exposa son Jésus
marchant sur les eaux, les artistes et quelques gens de goût
 seuls lui rendirent la justice qu'il méritait; maintenant qu'il
 s'est éloigné autant que possible du vrai, il obtient à chaque
 Exposition un succès passionné. Il eu est^arrivé autant à
 Court, l'auteur de la Mort de César, le meilleur tableau qui
 nous soit venu de Rome depuis vingt ans : il ne s'est fait
 une réputation que depuis que, reniant et ses études sévères
 et son propre goût, il s'est décidé à imiter Dubufe dont il
 exagère encore les défauts. Dans tout ceci, qui faut-il blâmer
 l'artiste, ou le public?
   Voici maintenant M. Biard, qui n'est ni grand coloriste,
ni dessinateur parfait, qui ayant réussi dans de petites scènes
familières (quand il ne se laissait pas aller à sa fougue et Ã