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170                          ANTOINE

vaudra Racine et Shakspeare. Je n'entre pas dans la question
des lettres chrétiennes ; on y arrivera quoique timidement,
et l'on s'étonnera de surprendre tant d'éloquence dans les Pè-
res grecs, tant de savoir et de philosophie dans les Pères la-
tins. 11 faut espérer que la grande ame de ces hommes si
nouveaux au milieu des peuples, et si étranges par le carac-
tère de leur morale, sera comprise et appréciée comme elle
a droit de l'être, et que, avec l'estime pour leur parole et
leur vie, on verra descendre dans les masses l'amour de la
céleste doctrine à laquelle ils se vouèrent tout entiers.
   Quand un poète spirituel disait dans un moment d'hu-
meur:
        Qui me délivrera des Grecs et des Romains?

il avait raison, parce que, dans ce moment-là, Gracchus t'ha-
billait et Scévola faisait ses souliers. Lorsqu'il s'agit des
Grecs et des Romains, nous ne prétendons pas qu'il faille
pousser jusque là le fanatisme du culte; mais nous croyons
que la défaveur qu'on s'est efforcé, depuis près d'un siècle, de
jeter sur les lettres anciennes, a été trop souvent une ven-
geance exercée contre l'ennui qu'on avait éprouvé à les étu-
dier, et nous conviendrons tant qu'on voudra que c'est trop
d'y passer fastidieusemenl une notable portion de la jeu-
nesse. Le dégoût est venu de la longueur et de la pauvreté
de l'enseignement; les Grecs et les Romains en sont-ils res-
ponsables?
    L'estimable écrivain dont nous voulons rappeler ici la vie
et les écrits, fut un fervent disciple d'Athènes et de Rome,
et passa dans l'étude des auteurs grecs et des latins les plus
belles heures de sa longue carrière. Après eux, il ne lisait
guère que nos classiques français, et manifestait assez vive-
ment son peu de goût pour les écrivains les plus modernes.
Le jargon politique, plus ou moins introduit dans les lettres