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EN ALLEMAGNE. 221 rapport, elle signale un immense progrès et prépare une vé- ritable régénération philosophique. Il faut savoir gré, avant tout, à ce penseur de s'être mis franchement en opposition avec Hegel. La critique amère qu'il fait de ce philosophe à tant de reprises, est plus d'une fois complètement juste, et frappe souvent en plein cette philo- sophie altière qui prétendait tout déduire du développement de la notion. Schelling a montré que cette notion, si tant est qu'on puisse lui concéder un mouvement quelconque, ne peut avoir qu'un mouvement logique, et ne peut donc jamais con- duire à l'explication de la réalité. La prétendue nécessité avec laquelle l'idée, au plus haut degré de son développement théo- rique, se transforme tout à coup en nature concrète, n'est, rien qu'une supposition gratuite. Schelling a fait voir que la science logique ne nous apprend rien de réel, qu'elle reste toujours dans le domaine idéal, que la réalité n'est pas le pro- duit de la conception dialectique. Il a déclaré avec raison que la philosophie hégélienne n'était rien qu'un système d'abs- tractions incapables de leur nature de se transformer en exis- tences positives et d'atteindre au but que dans leur orgueil elles se sont posé. Quant à la propre doctrine de Schelling, son principal mé- rite consiste dans l'importance qu'elle accorde à l'élément em- pirique de nos connaissances. Se donnant à elle-même le nom de « système historique, » la philosophie de Schelling a con- tribué à remettre en évidence la nécessite indispensable de l'empirisme en philosophie. Nous ne pouvons, sous ce rap- port, que féliciter Schelling de la tendance qu'il a suivie. Après le règne exclusif de l'apriorisme il fallait du courage pour revenir à un ancien axiome qu'on s'était plu à dédai- gner, et auquel on avait voué un souverain mépris. Bravant la tempête, Schelling a osé prendre en main la défense de la vérité opprimée. Il a remis en honneur le principe de l'expé-