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EN ALLEMAGNE. 219 lin, sans néanmoins oser la mettre sous les yeux du public. Il s'en faut de beaucoup qu'elle ne donne lieu à aucune criti- que, ou qu'elle réponde aux attentes magnifiques que des promesses irréfléchies ont pu faire naître. La philosophie né- gative et la philosophie positive se complaisent plus d'une fois dans des contradictions, et proclament souvent une identité mystérieuse là où il est impossible de découvrir autre chose que des oppositions inconciliables. Le nom même de ce sys- tème qui prétend être à la fois « un empirisme apriorique et un apriorisme empirique, » son caractère fondamental qui consiste à appuyer avec force sur la nécessité de l'expérience, tout en revendiquant à la raison « le droit d'avoir le prius absolu, même celui de la divinité, » sont, ce me semble, des preuves suffisantes de la vérité que nous avançons. Plus d'une fois aussi des mots prennent la place des pensées; une série de phrases poétiques et pompeuses a souvent la prétention de passer pour un développement d'idées. Les trois fantômes qui, sous les noms des trois puissances de l'idée de l'être, surgis- sent du fond obscur de la pensée de Schelling, pour nous don- ner nou la science du réel, mais la science des sciences pos- sibles, seront très convenablement placés dans celle catégorie -des idées verbales. À côté des abus de l'abstraction se décou- vrent sans cesse les traces d'une imagination qui n'est nulle- ment à sa place en philosophie. Ce n'est pas un système que Schelling nous expose; ce n'est pas d'après une méthode claire et précise qu'il développe ses pensées devant nous. Une idée brillante le frappe ; il nous en fait part, sans la baser sur un autre fondement que celui de la vision intellectuelle. A l'entendre s'abandonner à ses rêveries théosophiques et au hasard de ses constructions gnostiques, on croirait quelquefois avoir affaire, non à un philosophe du XIXe siècle, mais à un néoplatonicien ou à un philosophe d'Alexandrie. Les idées lumineuses qui jaillissent par intervalles dans son esprit nous