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RÉUNION DE LA FRANCHE-COMTÉ A LA FRANCE 517 moins que le patriotisme, animait tous les courages; les habitants croyaient que les Français en voulaient à leur foi. La ville fut canonnée, bombardée ; le siège dura près de trois mois. Dôle eut à souffrir toutes les horreurs delà guerre, de la famine et de la peste. A la fin, Gondé, menacé par l'arrivée du duc de Lorraine, fut obligé de lever le siège; il avait perdu 5.000 hommes. Le plus bel éloge des assiégés fut fait par Richelieu lui- même : « Plût à Dieu, s'écrïa-t-il, que les sujets du roi lui fussent aussi affectionnés que les Dôlois le sont à l'Espagne '. » III La levée du siège n'amena malheureusement pas la paix. La guerre ne faisait que commencer. Les Suédois, alliés des Français, pénétrèrent sur les hauts plateaux du Jura, sous le commande- ment de Bernard de Weimar ; Pontarlier et Saint-Claude furent brûlés (1639). Lorsqu'une guerre dure longtemps, elle devient toujours cruelle. La fureur est contagieuse; le paysan, maltraité, devient brigand à son tour; il quitte sa demeure ; ou, s'il y reste, il guette le soldat comme une bête malfaisante, et, dès qu'il peut le surprendre, il l'assomme 2. Dans ce cas, il ne s'agit plus de nationalité; la patrie se restreint au seul domaine possédé ; quiconque le menace est un ennemi. Au milieu de toutes ces horreurs, chacun ne songe qu'à soi. Les malades sont abandonnés. Un seul sentiment peut encore lutter contre la terreur qu'inspire la contagion : c'est la charité chré- tienne. A des maux, à des crimes, qui semblent dépasser la nature humaine, il faut des remèdes, des vertus, qui ne la dépassent pas moins. Le bienheureux Fourier imite alors, en Franche-Comté, principalement à Gray, ce que saint Vincent de Paul fait en Lor- raine. C'est au milieu de pareilles calamités qu'on peut juger une religion. 1 De Piépape II, 27. 2 Quelquefois les paysans faisaient se confesser les soldats avant de les tuer.