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                              LE CONGO                               435
 il sait que ses terribles fusils n'ont jamais servi à l'attaque, et que
 la paix et l'abondance accompagnent ses pas. Il me charge de te
 porter la parole de paix, et de guider son ami. » Les Français n'en
 pouvaient croire leurs yeux: ainsi donc ce terrible Makoko, dont
ils craignaient de ne pas obtenir l'amitié, faisait lui-même les pre-
mières démarches et envoyait un de ses vasseaux au devant d'eux.
De plus, ils avaient trouvé un précieux auxiliaire dans un Batéké
nommé Ossia, qui parlait presque tous les idiomes de l'Ogooué et
Congo inférieur, et qui était tout dévoué à la personne de M. de
Brazza et à ses projets.
    En arrivant vers le village qui sert de capitale au prince indigène,
les membres de l'expédition apprirent qu'ils allaient être introduits
immédiatement. Ils revêtirent alors leurs meilleures loques, car
leurs habits ne méritaient pas alors un autre nom ; puis Ossia frappa
sur les doubles cloches de la porte du palais, pour prévenir que le
chef des blancs avait achevé ses préparatifs. « Aussitôt la porte
s'ouvrit, raconte M. de Brazza. De nombreux serviteurs étendirent
devant mes ballots des tapis de toutes sortes, et entre autres une
peau de lion, attribut de la royauté. On apporta aussi un beau plat
en cuivre, qui datait de deux ou trois siècles et qui était de fabri-
cation portugaise : il devait servir de marchepied au roi Makoko.
Puis, quand un grand dais de couleur rouge eut été disposé au-
dessus de ce trône, le roi s'avança précédé de son grand féticheur,
et entouré de ses femmes et de ses principaux officiers.
    Makoko s'étendit sur sa peau de lion et s'accouda sur des cous-
sins; ses femmes et ses enfants s'accroupirent k ses côtés. Alors le
grand féticheur s'avança gravement vers le roi, et se précipita à
genoux, en plaçant ses mains dans les siennes ; puis, se relevant, il
en fit autant avec moi, qui étais assis sur mes ballots en face du
roi. Ces prostrations ayant été ensuite exécutées par chacun des
assistants, les présentations étaient accomplies. Elles furent suivies
d'un court entretien, dont voici à peu près le résumé : « Makoko est
heureux de recevoir le fils du grand chef blanc de l'Occident, dont
les actes sont ceux d'un homme sage. Il le reçoit, en conséquence)
et il veut que, lorsqu'il quittera ses Etats, il puisse dire à ceux qui
l'ont envoyé* que Makoko sait bien recevoir les blancs qui viennent
chez luij non en guerriers, mais en hommes de paix; »