page suivante »
386 LA R E V U E LYONNAISE étend son bâton sur le cadavre et le resuscite. Le jeune homme se lève, tombe aux pieds du saint : « Baptisez-moi sur le champ, lui dit-il.—Ta demande?... —• Est sincère. Après vous baptiserez celle que mon cœur préfère, ma Flore, mon bonheur. » On apporte au même instant le corps roidi de la pauvre noyée. André regrette son retour à la vie. L'apôtre le console : « P r i e le Christ, il t'exaucera. » André se prosterne;le saint est déjà en prière: « Flore, s'écrie- t—il, toi qu'une horrible tempête a brisée sous mes yeux, ouvre les yeux et vis par la volonté de Jésus ! » La jeune fille a ouvert les yeux. La foule qui l'en- toure, d'une voix unanime : « Martial nous voulons adorer ce Dieu que tu adores. » «Decejour, ôTullistes, vous avez renoncé à Satan: combien celadurera-t-il ? » Dans cette fresque de saint Martial nous avons cru retrouver la naïveté de ligne, naïveté voulue, de M. Puvis de Ghavannes avec ce souci de la couleur locale, qui rend si attrayante la peinture de M. J . - P . Laurens. Ce sont là deux éminentes qualités dans la manière de J. Roux. Hà tons-nous de les signaler, il ne les montre pas toujours. La seconde fytte l , le poème de la destruction de Cesaren, cette Pompéi du Limousin, incendiée par les Vandales, tandis que ses habitants s'amusaient à l'am- phithéâtre, est un tableau saisissant, bien que d'éclat modéré. Le paysage envi- ronnant semble peser sur l'horreur de la scène. Saint Dumine, au contraire, est la légende la plus éclatante qui se puisse voir ; toutes les aspirations du moyen âge, le culte de la femme, la guerre, la Pales- tine et le couvent la traversent comme un grand souffle. La bataille de Malamort, où la puissance des routiers fut réduite, est superbe, elle aussi, bruyante, horrible et variée comme la mêlée qu'elle met sous nos yeux. A côté de ces fortes pages qui dénoncent un coloriste, nous en placerons d'autres, moins égales peut-être, qui, par leur finesse de touche, achèveront de caractériser l'art du poète. L'histoire du Moine-de Glandier, dont le début a la fraîcheur naïve des légendes monastique?, et le poème de Saint Etienne à "Obasine, qui est plein de ces murmures mysti- ques des pieux récits du moyen âge où le concert de la nature se mêle aux prière» des hommes (pouf ne citer que deux exemples), ont cette imperfection, selon nous, qu'ils abandonnent parfois l'ampleur narrative pour s'égarer dans le lyrisme familier. Amanieu, quoique de même ordre et inspiration, est une exception glorieuse. L'église de Tulle, commencée en 1120, est presque achevée. Le clocher se dresse déjà ; il n'y a plus qu'à y mettre la croix. Un jeune clerc, Amanieu, se présente pour cette ascension difficile. Une fois au sommet, il est pris de vertige, et, devant son père, qui le suivait des yeux, il tombe aux pieds de la tour. « Vous connaissez la niche qui se trouve à côté du porche? Elle était fermée autrefois par une grille ; il y avait au fond une inscription, que j'ai lue bien souvent, dans mon enfance, en allant à l'école. C'est là qu'on mit Amanieu; plus tard, on ouvrit le tombeau et le corps tomba en poussière ; et maintenant plus rien ne reste du jeune homme qu'un souvenir et mon humble chanson. » K mautenen res pus ne sobra del gwsou Mas una souvenensa e ma paubre chanson. ' i Nous employons un mot de lord Byron, que rappelle ti-ès heureusement Mi 11. Suchier, dans sa courte notice de la Gazette à "Augsbonrg sur le félibre limousin.