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418                  LA REVUE LYONNAISE

   C'est une conséquence assez naturelle de ce caractère d'enquête
qu'a pris tout l'ouvrage de M. de Beaucourt. Il a formé, avec une
patience admirable, le dossier de l'histoire de Charles VII, et de
celle de son temps. L'instruction d'une cause a nécessairement
quelque froideur. Elle ne devient intéressante que lorsqu'elle révèle
des faits nouveaux, lorsqu'elle pique notre curiosité par des détails
inattendus. Ce n'est point sur Jeanne d'Arc, depuis les savantes
publications de M. Quicherat, que nous avons à découvrir des
choses inconnues. Là, il n'y avait qu'à conclure, et il semble que
M. de Beaucourt ait voulu laisser ce soin au lecteur.
   L'infatigable travailleur poursuit sa tâche, et bientôt il sera
possible d'apprécier dans son ensemble cette étude magistrale d'un
des règnes les plus importants de notre histoire. Ce sera l'œuvre
capitale de toute une existence, l'exemple noblement donné de la
recherche du vrai poursuivi sans relâche, avec une conscience,
avec un scrupule qui mériteraient qu'on donnât pour épigraphe
à cet ouvrage l'adage : Vitam impendere vero. Le style sobre et
ferme, d'une simplicité et d'une lucidité singulières, n'est pas un
indice moins certain de cette préoccupation toute désintéressée qui
anime l'écrivain. Nulle tendance à l'effet ; on sent que l'auteur
est pénétré du mot célèbre de La Bruyère : « Ce sont les faits qui
louent et la manière de les raconter. » Mais notre grand moraliste
eût bien vite ajouté lui-même, s'il eût été prié de développer sa
pensée, que cette « manière de raconter » ne fait pas moins l'éloge
de l'auteur que du personnage dont l'écrivain raconte la vie. Il
y a là quelque gloire dont l'historien bénéficie par surcroît, et
comme tous les biens qu'on n'a point recherchés, mais qui sont la
conséquence d'une supériorité véritable, cette gloire n'est ni la
moins solide, ni la moins durable.


                                         G.-A.   HEINRICH.