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30 LA R E V U E LYONNAISE pement sur les champs de bataille de la Crimée, et triompher enfin au grand profit de notre voisine, et à l'éternel honneur de Cavour, dans les plaines de Magenta et de Solférino. La grande partie dont parlait le comte était désormais gagnée pour l'Italie et peut- être perdue pour la France. Il Dans sa jeunesse, Cavour s'était laissé emporter par son amour de la liberté jusqu'aux opinions les plus exagérées. Il passait pour radical, et aussitôt après la mort de Charles Félix, le nouveau roi, qui n'aimait pas son ancien page, l'envoya en disgrâce au fort de Bard. Le temps modifia ses jugements sur les hommes et les choses. Sans détruire ses aspirations généreuses, la réflexion les modéra. En 1847, pendant qu'il était à Leri, tout occupé de réformes agri- coles, entretenant une correspondance suivie avec les inventeurs de nouvelles machines, il faisait, dans une lettre au marquis de Beau- regard, sa profession de foi politique, sur le ton de la sagesse et d'une certaine mélancolie. « Je suis au fond aussi libéral que je l'étais a dix-huit ans : dans ce sens que je désire toujours ce qui peut amener le plus grand bien de l'humanité et le développement de la civilisation. Je suis tout comme à la sortie du collège, persuadé que le monde est entraîné par une marche fatale vers un but nou- veau ; que de vouloir arrêter le cours des événements, c'est sus- citer les tempêtes, sans chance de faire rentrer le navire au port. Mais je suis maintenant persuadé que les seuls progrès réels, ce sont les progrès lents et sagement combinés. Je suis convaincu que l'ordre est nécessaire au développement de la société, et que de toutes les garanties de l'ordre, un pouvoir légitime qui a de profondes racines dans l'histoire du pays en est la meilleure. » Ces opinions, Cavour les conserva toute sa vie. C'est pour les défendre qu'il s'associa avec Balbo, Santa-Rosa et d'autres à la fondation du lïisorgimenlo. Ce journal-ministre arriva bien vite à dominer le pays et prit tant d'influence, qu'en 1848, un article paru dans cette feuille sous la signature de Cavour détermina