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— 324 — promettait de répandre sur la ville, les deux étrangers en emportèrent, comme impression finale, celle de ténèbres opaques. Ils s'embarquèrent à deux heures du matin, par une nuit noire, sur la Saône, avec une centaine d'artilleurs. Les rives étaient à peine indiquées de temps en temps par quelque faible lumignon et c'est seulement à la vitesse plus forte du courant qu'on s'aperçut que l'on avait passé de la Saône dans le Rhône. A mesure que le jour se leva, le paysage apparut dans toute sa splendeur, attristée seulement par des ruines récentes, œuvre de la Révolution, moins vénéra- bles et moins pittoresques que leurs voisines, restes de l'antiquité et du moyen âge. La chaleur devint très forte ; Piickler fut affligé d'une telle migraine qu'à l'arrivée à Valence où l'on devait passer la nuit, il n'eut pas la force de descendre à terre. Les soldats ne s'étaient pas laissé incommoder par le soleil comme lui. Ces Français débrouillards eurent tôt fait de décou- vrir sur le bateau des morceaux de bois qu'ils disposèrent habilement en étendant leurs capotes par dessus, de manière à créer des tentes conforta- bles. Leur conversation fit dresser l'oreille à l'officier saxon de la veille : « Ils s'entretenaient, dit-il, de toutes sortes de sujets qui les menaient assez fréquemment sur le terrain scientifique. Pour nous autres Allemands, c'est une cause de profond étonnement de voir combien le simple soldat français est souvent cultivé, plein d'ambition, ce qui ne l'empêche pas d'être gentil et d'avoir des prévenances que souvent nous cherchons en vain chez nos officiers. Pas de trace ici de cet orgueil funeste qu'on montre chez nous à l'égard du paisible bourgeois, de cette conviction que l'on peut impuné- ment offenser un civil. J'ai remarqué au contraire qu'ils se permettent plutôt quelques libertés envers leurs semblables qu'envers des étrangers, quoiqu'aucun d'eux ne supporte une véritable injure, fût-ce de la part de son meilleur camarade. En ce cas, le simple soldat se croit obligé d'obéir aussi rigoureusement que son général au point d'honneur, sans rechercher si c'est le vrai ou le faux, car une conception une fois admise par tout le monde lie tous les particuliers ». Ce fonds d'instruction, cette politesse, ces sentiments chevaleresques n'excluaient pas cependant des propos de nos troupiers l'usage fréquent d'un mot qui, prononcé ou non sept ans plus tard à Waterloo, devait immortaliser un de leurs chefs. De Valence, Piickler avait espéré pouvoir se rendre dans le sud du