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      « Enfin une porte s'ouvre, le cœur me bat à rompre dans ma poitrine...
Un eunuque noir apparaît. Allah ! qu'il est laid ! Mais, à sa suite, qu'elle est
belle. Il m'a semblé voir poindre dans l'histoire, après le règne obscur des
tyrans, une aurore de liberté... y.
      Mais revenons en séance. Sur notre proposition de loi des discours ont
été faits au cours d'une discussion générale. Ils ont été pour quelques-uns
refaits à propos des articles. Des précisions ont été demandées. Des inter-
ruptions ont jailli. Elles sont parfois reposantes comme celle que rapporte
Blaveau dans ses souvenirs parlementaires sur la discussion de la propriété
littéraire en 1866.
      Pendant le discours de Quéroult, un incident égaya la Chambre. Il
avait dit, un peu imprudemment : « Si les fils de Corneille et de Molière
veulent être payés et honorés par nous, qu'ils fassent le Cid et le Misan-
thrope ». Et il s'était arrêté une demi-seconde sur cette phrase à effet. Des
hauteurs de la droite, une interruption retentit. Il y avait alors parmi les
députés de Rouen un vieillard nommé Corneille qui était l'arrière-petit-
neveu du cousin de celui dont Napoléon eût voulu faire un prince. Il
s'écria dans un élan de modestie : « Les moules de grands hommes sont
brisés ». Mais Quéroult continuant à taquiner les descendants des grands
ancêtres, il n'y tint plus et, d'une voix plus forte qu'on ne l'eût attendue de
son âge : « Je demande la parole ». — « Pour un fait personnel! », ajouta
Belmontet qui avait quelquefois de l'esprit. Et l'on se mit à rire dans cette
Chambre où l'on riait peu. Quant à M. Corneille, député de Rouen, content
sans doute d'avoir demandé la parole, il ne la prit pas.
     Il est rare qu'au cours de la discussion d'une loi éclate un de ces orages
que le public des tribunes appelle toujours de ses vœux. Cela est réservé
aux interpellations. Des paroles vives peuvent parfois s'échanger mais elles
sont accueillies de part et d'autre avec la sérénité dont Jules Simon a dit un
jour le secret : « Quand un contradicteur m'appelle gredin, je comprends
qu'il m'accuse de ne pas être d'accord avec lui sur la façon d'allumer les
réverbères ».
      D'ailleurs les ressources d'habileté parlementaire employées pour
expliquer et atténuer un mot excessif ou une épithète malsonnante sont
infinies. Le 31 juillet 1874, Gambetta apostrophait, à l'Assemblée natio-