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- 6 9 - complétés et souvent même reliés ; de là ils les envoient à leurs correspon- dants de France, d'Espagne et d'Italie, mais ils évitent avec grand soin de les faire transiter à Lyon, parce que le Consulat, poussé par les imprimeurs et entrant dans leurs vues, a organisé une sévère surveillance douanière sur ces impressions clandestines, qui ne manqueraient pas d'y être saisies. « Les livres de Genève entrés en contrebande descendent par le Rhône jusqu'à Montluel où, après avoir subi des modifications dans leurs titres, ils pren- nent, les uns la direction de l'Espagne, les autres celle de l'Amérique après un transit en Portugal : les premiers traversent le Rhône en bateau, descendent par voie de terre jusqu'à Feyzin et de là s'en vont à la mer sur le Rhône ; les autres sont transportés par voiture à Roanne par le Beaujolais, et dirigés ensuite sur Nantes par la Loire. Ainsi vont les choses, des années durant ; tant et si bien que, en 1588, la plus grande partie des livres lyonnais s'impriment au dehors. Grand aria dans les ateliers ; les imprimeurs se fâchent. Sur leur demande expresse, il est décidé qu'une confrontation aura lieu au Consulat avec les libraires coupables, et, le 14 juillet, mandés par les échevins, Guillaume Rouillé, David de Gabiano, Antoine de Harsy, Pierre Landry, Jean-Baptiste Re- gnaud, Jean Veyrat et Jean Pillehotte se présentent à l'Hôtel Commun. Les imprimeurs les y ont précédés. « Au grand détriment de la Ville de Lyon, et au nôtre, leur disent les imprimeurs, vous avez détruit l'imprimerie lyonnaise et vous l'avez trans- portée à Genève » ; et, qui pis est, « vous osez faire mettre à la première feuille des œuvres imprimées à Genève, qu'elles l'ont été à Lyon, afin qu'elles puissent avoir cours en Italie, en Espagne et autres pays catholi- ques, ce qui est une fausseté et supposition de nom. Par là , l'impression qui souloit avoir un grand cours et réputation en ceste ville de Lyon, sera du tout perdue ». — Il a bien fallu que nous en agissions ainsi, répliquent les libraires, les compagnons imprimeurs nous « font payer l'impression d'une rame de papier 33 et 34 sous, quand autrefois ils n'en souloient payer que 20 et 25 » ;