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— 323 — reçu nous-mêmes chaque jour les preuves les plus frappantes, leur vif senti- ment de l'honneur, leur culture plus haute et surtout plus générale par laquelle ils l'emportent sur toutes les autres nations, voilà des qualités que l'on aime à voir chez les maîtres du monde et qui sont doublement méri- toires. Que de raisons pour nous de supporter avec résignation notre joug qui nous a été imposé par notre propre faute, en nous estimant heureux que ce soit aux Français que nous avons à obéir ! ». Chose remarquable, Pûckler resta fidèle pendant toute sa vie à ses sympathies pour la France, nées à Lyon. Quand son devoir d'Allemand le lui ordonna, il prit les armes contre nous. En 1814, il se distingua aux Pays- Bas dans les rangs de nos ennemis. En 1870 encore, âgé de 85 ans, il fit au roi de Prusse des offres de service qu'il eut l'amertume de voir décliner. Mais il déplorait tous les conflits qui mettaient aux prises la France et l'Allemagne. Ces deux nations lui apparaissaient comme les deux grands flambeaux de la civilisation et, dans de nombreux écrits, il se fit le champion d'un projet d'alliance qui les aurait unies contre le mercantilisme anglais. El Pûckler et Alexandre de Wulffen (le frère était parti pour Strasbourg) auraient volontiers prolongé leur séjour dans la ville hospitalière qui les avait si favorablement disposés à l'égard de la France. Mais leurs projets étaient vastes et leurs ressources restreintes. Aussi résolurent-ils de profiter d'une occasion qui leur permettait de continuer leur voyage à peu de frais. On voulut bien les accepter à bord d'un bateau qui allait transporter dans le Midi des soldats destinés à l'armée d'Espagne. Cette bonne aubaine avait sa contre-partie ; elle les privait du plaisir d'assister à un spectacle que des affiches annonçaient pour un des jours suivants en ces termes : « Stella, grand artificier, aura l'honneur de présenter aux habitants de cette ville le feu d'artifice le plus étonnant qui ait encore paru depuis que le monde existe. Ce feu d'artifice présentera une bataille dans laquelle les ennemis marcheront les uns contre les autres... et le tout sera terminé par la représentation brillante de l'Empereur Napoléon dans toute sa grandeur ». Au lieu de partir tout éblouis par les torrents de lumière que Stella