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516                      LA R E V U E LYONNAISE
gros canons et des mortiers La milice de la ville comprenait tous
les habitants jusqu'à l'âge de soixante ans; elle se tint à l'intérieur
et sur les remparts, pendant que les troupes gardaient les portes
et les fortifications avancées.
    A la tête de la défense se trouvait l'archevêque de Besançon,
gouverneur de la Franche-Comté, Ferdinand de Rye. Bien qu'âgé
 de quatre-vingts ans et infirme, il vint s'enfermer dans les murs
 de Dôle; et, comme il avait été soldat, il put joindre le conseil à
l'exemple. Le marquis de Saint-Martin1, gouverneur particulier de
 la ville, faisait alors la guerre en Allemagne : le colonel de la
 Verne le remplaça, et ce fut lui qui eut le commandement des
 troupes régulières. Le maire (mayeur) était un Saint-Mauris 2,
 nom célèbre dans la Comté. Le parlement montra plus de zèle
 que de capacité. Deux de ses membres se distinguèrent :
 Girardot de Nozeroy, qui courut le pays pour lever des troupes
 de secours, et le conseiller Jean Boyvin, qui s'enferma dans Dôle
 avec sa femme et ses cinq enfants. Leur activité même donna mal-
 heureusement de l'ombrage au parlement. Le clergé, à l'exemple
 de l'archevêque, montra un grand patriotisme. La plupart des
 nobles n'en eurent pas moins ; mais quelques-uns d'entre eux, re-
 butés par l'Espagne et le parlement, commençaient à tourner leurs
 regards vers la France. Le peuple était plein de bravoure et sui-
 vait volontiers les moines mendiants qui se mettaient à sa tête.
 L'artillerie, peu importante, car elle ne comptait que deux canons
  et quelques coulèvrines que l'on bourrait avec de vieux procès,
 était servie par un capucin, le père Eustache.
     Les femmes, les enfants montrèrent un courage héroïque. On
 vit des femmes se déguiser en hommes, pour prendre part aux
  sorties. Un jour, trois femmes portaient du vin dans un ouvrage
  avancé. Deux d'entre elles furent coupées en morceaux par une
  volée de mitraille; la troisième mit tranquillement dans son panier
  les charges de ses compagnes et poursuivit son chemin. Des en-
  fants de treize à quatorze ans allaient moissonner et fourrager
  jusque sous les yeux des Français. Le sentiment religieux, non

  1
     Jean-Baptiste de la Baume-Monlrevel, marquis de Saint-Martin-(I, 396 note).
   1 Jean- Baptiste de Saint-Mauris, seigneur d'Augerans.