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             L'ÉGLISE DE SAINT-SORLIN


      Combien il est désirable que soit suscité, au plus tôt, dans notre région lyonnaise,
un vif mouvement d'opinion en faveur de la conservation attentive, de l'entretien
intelligent des vestiges pittoresques du passé. L'activité officielle des institutions déjà
créées pour veiller sur nos richesses historiques est impuissante à préserver de la
destruction tout ce qui, dans notre région, mérite d'être conservé. Elle ne va d'ailleurs
 qu'aux gros morceaux, aux choses d'importance qui ont conquis plus ou moins facile-
ment l'attention publique : les cathédrales moyenâgeuses, les églises romanes, les
 constructions gallo-romaines, les murailles fortes des grandes cités, les hôtels de ville,
 les châteaux historiques, etc. Mais il est une foule de restes du passé, dont la valeur
historique est pourtant notable, qui sont abandonnés à une lente destruction : ruines
de châteaux-forts, tumulus préhistoriques, anciennes maisons de villages, vieilles
églises de campagne, vieux petits ponts gothiques, tours isolées, etc. Il faudrait, pour
ces restes historiques « non classés » des efforts spontanés de protection, qu'ils soient
individuels ou collectifs, fruits naturels d'une opinion ambiante favorable.
      Tout auprès de l'église romane de Champagne, dans l'Ardèche — église classée
monument historique, réparée et entretenue comme telle — on voyait naguère un
vieux petit pont en pierre franchissant, en demi-cercle, à côté de la route, un clair
ruisseau. Le coin était charmant. Les nombreux visiteurs de l'église de Champagne
l'admiraient en passant et beaucoup le photographiaient. L'eau du ruisseau gazouillait
et miroitait entre des roches moussues, les bords se veloutaient d'un vert gazon, le
ponceau semblait un ruban de pierre soulevé par le vent, de beaux noyers ombra-
geaient le paysage que bornait un vieux pan de muraille. Une pioche stupide a jeté bas
cette jolie petite chose du passé. Une ambiance de pensée cultivée aurait dû la proté-
ger.