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pas croire que M. de Genève fût saint et canonisé parce qu'il avait dîné vingt fois avec
lui à Lyon. Après diverses visites au duc de Nemours et au prince de Piémont, il
rentra harassé.
       Ayant pris la bote pour partir avec la cour, « il dit qu'il s'était botté pour n'aller
guère loin. Il dîna ensuite et resta longtemps pensif appuyé sur la table. La dernière
lettre qu'il écrivit au monde fut pour une sainte action où il protestait à Madame
l'abbesse de la Déserte (Marguerite de Quibly) de la tenir pour sa fille et de contribuer
pour la restauration de son monastère tout ce qui serait en sa puissance.
       « Les caractères de cette lettre, mal formés et plus mal peints que d'ordinaire,
font voir que ce serviteur de Dieu endurait déjà et ne s'en osait plaindre pour l'amour
qu'il portait à la vertu de patience et à l'exemple de son doux Sauveur. Des trois
lettres qu'il écrivit ce matin, il n'en put achever que deux : la troisième demeura
imparfaite. Il faut juger déjà si le mal le tenait ».
       Une de ces lettres était adressée sans doute à sainte Chantai, car elle nous dit,
toujours dans sa déposition : « Un jour avant sa mort, il m'écrivit : « Maintenant, je ne
« puis rien dire de mon âme sinon qu'elle se sent de plus en plus le désir très ardent de
« n'estimer rien que la dilection de Notre-Seigneur crucifié ».
       Des religieux vinrent lui dire adieu, sachant qu'il allait sous peu rentrer à Annecy
et ses serviteurs remarquèrent qu'il ne les reconduisit point. Un instant après, un de
ses serviteurs lui parla d'un sermon où le prédicateur avait recommandé à la reine
 d'aimer ses serviteurs. « Et vous, mon ami, m'aimez-vous bien i » lui demanda-t-il. Il
 ajouta : « Moi aussi, je vous aime bien, mais aimons encore plus Dieu qui est notre
 grand maître ! ». Il tomba évanoui en disant ces mots. On le mit au lit, dans ce lit de
 bois à colonnes, surmonté d'un baldaquin, que nous avons pu vénérer avec émotion
 il y a quelques jours au parloir de la Visitation. Il était environ deux heures de l'après-
 midi, une demi-heure après, une attaque d'apoplexie le paralysait. Il manifesta un
 grand désir de recevoir l'extrême-onction, se confessa et fit sa profession de foi. Vers
 une heure, on lui administra les saintes huiles, mais non point le saint viatique à cause
 de fréquents vomissements. Il avait alors sa pleine lucidité d'esprit et se fit mettre au
 bras son chapelet auquel étaient attachées diverses médailles de Lorette et de
 Rome.
       Le matin venu, nous dit Charles Auguste de Sales, il fut visité par le Reverendis-
 sime évêque de Damas, Robert Berthelot (l'auxiliaire de Lyon et l'un de ses amis),
 lequel de prime abord lui tint ces propos : « Frère François, quel changement de la
 « dextre du Très Haut! La veille de Noël vous me vîntes voir et me dîtes adieu et
 « maintenant je suis contraint de vous venir voir et de vous dire adieu i ». Le malade le
 regarda et témoignage de bienveillance lui étendit la main pour la lui donner. Alors
 l'évêque de Damas continuant de lui parler, dit qu'il était venu pour le secourir,
 et se servit des paroles de Salomon : « Le frère qui est aidé par le frère
 « est comme une cité bien munie ». Le malade répondit : « Et le Seigneur sauvera
 « l'un et l'autre ». Après quelque moment, l'évêque de Damas murmura ce verset *            .
 « Jetez votre pensée au Seigneur ». Le malade poursuivit « et il vous nourrira » et tout