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328 BIBLIOGRAPHIE. la forme, c'est-à -dire, l'expression. Qu'on se rappelle la frise du Parthénon représentant le combat des Lapithes et des Cen- taures. Assurément voilà le ciseau de Phidias ! I! y a dans la pureté du dessin, dans l'harmonie des lignes, dans la simplicité de la composition un sentiment profond de la sculpture. Mais regardez tous ces héros , ils luttent, tombent et meurent sans que leur figure atteste la moindre émotion ; prenez toutes ces têtes séparément en dehors des attitudes du combat, y trouve- rez-vous l'expression que vous attendez ? y verrez-vous rayon- ner un seul de ces sentiments divers que suppose nécessaire- ment l'action ? Ce sont des physionomies calmes d'hommes au repos. C'est cette vie, cette expression qui manque à l'art ancien, qu'a deviné l'art moderne. .L'artiste cherche aujourd'hui à faire briller dans son œuvre une étincelle de cette Lcauté invisible, de cet idéal archétype qu'il a entrevu dans ses rêves, et qui de- vient son incessante préoccupation devant la toile ou la pierre dans laquelle doit s'incarner sa pensée. Quelle œuvre de Phidias, d'Apelles ou de Cléomène peut soutenir la comparaison avec une toile de Raphaël pour la science de la composition et la richesse de la pensée, ou seulement avec le moindre tableau du Poussin pour la profondeur du sentiment ? L'art moderne surpasse l'art antique de toute la hauteur du Christianisme sur les mytholo- gies païennes. La seule gloire du ciseau grec, c'est la pureté des formes, et pour cela nous ne l'égalerons jamais. Les sensuelles imaginations de ses artistes s'accommodaient mieux de l'absence de toute pensée que de l'ombre même d'un défaut physique. Les raisins deZeuxis, si bien imités que.les oiseaux venaient les becqueter, étaient pour eux le comble de l'art. Leur beauté, c'é- tait la forme, comme leur éloquence n'était souvent qu'une sen- sation soumise avant tout aux lois de l'harmonie musicale ; une flûte n'accompagnait l'orateur qu'afln que les modulations de sa voix ne dépassassent pas le nombre de notes voulues pour l'oreille délicate de ses auditeurs. Homère lui-même, comme le remarque justement Lessing, est un sculpteur ; nul n'a comme lui le sens exquis de la précision et de la netteté des images. Quoi de mieux arrêté que le dessin de tous les êtres auxquels il donne