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BIBLIOGRAPHIE. 165 pagnies de bateaux trouveront qu'on n'en fait pas assez, et réclameront peut-être son entière démolition et son rempla- cement par un pont suspendu. M. Léon Alègre, de Bagnols, petite ville voisine du pont Saint-Esprit, vient de publier une intéressante notice sur le monument en question. Il proleste douloureusement, et sans trop d'amertume, contre cette manie utilitaire qui enlai- dit tout ce qui est beau. L'auteur est d'autant plus affecté qu'il défend une des gloires de son pays, et que lui-même il cultive les arts: « Ce n'est pas sans un sentiment de profond regret que j'ai vu hier le marteau de quelques ouvriers muti- lant un des monuments les plus remarquables de notre France du moyen âge. Le ponf du Saint-Esprit est condamné à êlru décapité ; bien plus, l'œuvre est en voie d'exécution. Comment la Société française pour la conservation des monuments, so- ciété toujours attentive, toujours empressée, ne se serait-elle pasémueen présence d'un tel acte ?.... On coupe impitoyable- ment de ce pont deux arches en pierre pour les remplacer par un tablier en fonte de fer.... » M. Léon Alègre fait ensuite l'histoire de la construction du pont par les disciples de saint Benezet, qui venaient d'a- chever celui d'Avignon : « on établit une confrairie divisée en trois corps : les frères parcourant les villes et les campagnes, et allant quêter dans la chrétienté; ceux-ci travaillant aux car- rières du Bourg Saint-Andéol, descendant sur le Rhône les matériaux préparés, et les frères chargés de la construction du pont. » Admirable Société de bonnes actions dont la Bourse ne ferait pas le moindre cas ! Le pont Saint-Esprit était un point stratégique des plus importants : nous voyons défiler ces armées de brigands qu'on nommait les Rouliers,les Tard-venus,les Grandes Compagnies, allant rançonner le pape, siégeant à Avigon. Après une série d'événements, nous arrivons enfin aux Camisards, et même jus- qu'à la fatale année 1793, dans laquelle Cartaux fil passer le pont à son armée. « Le pont du Saint-Esprit semblait devoir être à jamais res- pecté. Depuis quelques années, on a débarrassé la rive droite et les abords du monument des moulins à blé, qui gênaient le cours des bateaux à vapeur.... Aujourd'hui les deux arches sont presqu'cnlièrement démolies, et nous n'avons plus qu'à exhaler de stériles regrets. » Paul SAINT-OLIVE