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    494                         BIBLIOGRAPHIE.
     à la main, est un visiteur qui désire être présenté à nos amis,
     dans ce salon qu'on appelle un Journal ou une Revue. Nous le
     faisons asseoir, nous causons. S'il est sot, ennuyeux, ou pis en-
     core, il y a cent façons de réconduire, mais nous n'irons pas pour
     cela publier ses défauts sur les toits, et en faire des gorges chau-
     des; cela n'est ni poli ni charitable. Au contraire, notre heureuse
     fortune nous a-t-elle amené un homme d'esprit qui soit en même
     temps un homme de cœur? Oh! alors c'est grande fête chez
    nous : nous lui ouvrons la porte à deux battants, nous le pré-
     sentons à ceux qui veulent bien venir nous voir, pour les faire
    jouir de son mérite comme nous en avons joui nous-mêmes.
       S'il faut l'avouer, nous tâchons même de faire briller son es-
    prit comme un joaillier fait scintiller ses bijoux ; cette petite habi-
    leté est bien permise, puisque tout le monde y gagne. Est-ce à
    dire pour cela que notre nouveau-venu n'ait point de côtés fai-
    bles? que ce soit un phénix, une merveille, une perfection ? Eh.'
    mon Dieu, la perfection n'est nulle part dans ce monde péris-
    sable. Le soleil lui-même a des taches, ce qui n'est point une
    raison de nier sa lumière ni sa chaleur. Au nom du ciel ayons
    donc un peu d'indulgence,
          Et faisons un peu grâce à la nature humaine !
      Notre brave Horace, tout païen qu'il était, et proscrit par l'abbé
    Gaume, l'entendait plus chrétiennement. 11 nous recommande
    de ne pas trop scruter les défauts d'autrui, de nous examiner
    nous-même pour voir si nous n'en avons pas de plus graves,
    de dissimuler même ceux qui déparent les qualités de nos amis:
                At pater ut nati, sic nos debemus amici
             Si quod sil vilium non fastidire.
    Et ailleurs, en parlant des défauts littéraires :
               Ubi plura nitent in carminé, cur ego paucis
             Offendar maculis ?
    Ce qui veut dire , ô sévères critiques, que les légères imperfec-
    tions que vous avez épluchées avec tant de soin n'auraient point
    dû fermer vos yeux aux mérites solides d'un livre où une haute
    inspiration spiritualiste, morale, chrétienne, est revêtue des for-
    mes les plus aimables et quelquefois les plus éloquentes.




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