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LITTÉRATURE. 317 événements funestes, et il faut l'en féliciter, car rien ne con- tribue autant a reposer l'âme fatiguée du lecteur. Parmi ces épisodes, il en est un surtout qui me paraît d'une véritable beauté et de plus parfaitement approprié au sujet. C'est non seulement un épisode, mais encore une création originale, une machine épique, si j'ose m'exprimer ainsi, qui ajoute de la grandeur et du charme à l'ouvrage. Le souverain de Russie, réduit aux abois, a pris une grande résolution : pour se soustraire a la domination française, il a décidé que l'antique capitale de ses Etats, que Moscou la sainte serait livrée aux flammes. La Charité est instruite de ce dessein et elle frémit des maux affreux que son exécution doit entraîner. Dans sa perplexité, elle monte au ciel et là , se jetant aux pieds de l'Eternel assis sur son trône, elle le conjure d'empêcher un si épouvantable malheur. Mais Dieu lui répond que le premier des biens qu'il a dispensés aux hommes, c'est la Liberté, et que, tout en gémissant sur les suites de la castatrophe que sa fille bien-aimée lui signale comme prochaine, il ne peut s'opposer a ce qu'un peuple fasse son possible pour rester libre. Je ne crains pas de le dire, cette idée est digne d'Homère. Quant h la manière dont * elle est rendue, il n'en est pas tout-à -fait de même et bien des vers auraient besoin d'être retranchés. Cependant il s'en trouve un certain nombre qu'on peut citer avec honneur ; les suivants par exemple me paraissent remarquables : Sous la voûte des cieux Veillait une vertu dont les mains en tous lieux Répandent des bienfaits, soulagent des souffrances, Apaisent des fureurs, préviennent des vengeances ; Elle sait, s'il le faut, prendre tous les dehors, Braver tous les dangers, vaincre tous les efforts. Là , riche généreux, à l'orphelin qui pleure, Elle ouvre, auxjours d'hiver, le seuil d'une demeure.