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CHRONIQUE LOCALE. 85 regard puisse saisir et embrasser en entier. Or l'œil du visiteur pourra-t-il soulever la couverture de ces nombreux volumes, s'initier, non pas au fond, mais seulement à leur titre ? Non, et c'est là , nous le craignons fort, la raison qui fera rejeter im- pitoyablement tout envoi qui n'aurait pas pour première condi- tion celle d'être vu et jugé d'emblée. Exposez des livres comme produit typographique ou comme spécimen de reliure, bien ! mais comme œuvre littéraire ou scientifique, cela est, selon nous, de toute impossibilité. Les Dais de Saint-Nizier et de Saint-Poly carpe. — La polémique peu courtoise dont nous avons été les témoins, aurait dû, ce semble, nous faire renoncer à ce compte-rendu ; mais comme la Revue doit enregistrer tout ce qui, de loin ou de près, touche à l'honneur de la cité, et que les œuvres dont nous avons à rendre compte ont un certain mérite d'exécution, nous dirons franchement notre avis ; nous le dirons sans partialité, d'autant que nous avons à replacer la question sous son véritable point de vue. Il y a quelques semaines, l'opinion publique fut appelée officiellement à se prononcer sur l'exécution d'un dais, style moyen-âge, destiné à l'église de Saint-Nizier. La Gazette de Lyon, sans se préoccuper de la question in- dustrielle, émit sur l'ensemble et les détails de ce dais un jugement moins favorable qu'on ne l'avait peut-être espéré. La critique était sévère... Hélas ! la vérité l'est toujours : Il senso coro è duro a dit un poêle, c'est peut-être fort heureux pour les arts. Mais cette critique si sévère était-elle juste ? Les uns disent : oui, les autres, non. Que devaient faire les susceptibilités blessées ? Reprendre en sous-œuvre le travail du rédacteur, le suivre et le combattre pied à pied, s'appuyer de l'avis d'artistes spéciaux, et, par des exemples tirés de monuments d'un goût et d'une pureté incontestables, démontrer que l'œuvre en question, loin de mériter des reproches, était conforme aux règles de l'art, et pouvait répondre aux exigences du goût le plus raffiné. Au lieu de cela, on a tonné du haut de la chaire. Le sermon qui aurait dû mourir dans l'enceinte du temple s'est vu colporté, livré à un autre journal, lequel s'est empressé de le servir à ses lecteurs, revu et cor- rigé, et la simple question d'art agitée par le rédacteur, de la Gazette s'est changée sur l'arène en une lutte de personnalités. En effet, ce qu'on mettait en cause, c'étaient des maisons de commerce honorables, qu'on opposait l'une à l'autre, soit en glissant des insinuations déloyales, soit en pronon- çant des noms qui ne devaient pas se montrer dans le débat.