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454               EXCURSION DANS LE MIDI.

   En mettant le pied sur le rivage, il faut vous attendre à
faire une première et rude épreuve de l'ardeur méridionale.
Des nuées de portefaix se rueront sur vous pour s'emparer
de vos bagages et les porter en ville, quoique vous fassiez,
quoique vous disiez, malgré vous. Malheur, si dans cette ba-
garre vous n'êtes pas solide sur vos jambes, car vous pourrez
bien saluer la terre de Provence comme fit autrefois un Sci-
pion abordant le sol africain. Après cela dans votre chute,
foulez-vous un pied, cassez-vous une jambe, c'est fâcheux,
mais vous n'auriez rien à dire. Vous aurez affaire à la com-
pagnie des Portefaix d'Avignon ; ces messieurs ont leurs pla-
ques, ils sont en règle.
   Quant aux maîtres d'hôtels, leurs attentions pour les étran-
gers sont délicates et courtoises. Ils les envoient chercher en
voilure. Une calèche élégante à deux chevaux fringants nous
emmena au galop dans la cour de l'hôtel de l'Europe, chez
Mme Pierron.
   Quelques instants après, je gravissais avec un obligeant ci-
cérone, les rues étroites et tortueuses qui conduisent au palais
des Papes.
   Je crois qu'il est en France très-peu de vues aussi grandio-
ses, aussi magnifiques, que celle dont on jouit de la cîme de
ce lieu, aujourd'hui aride et désolé, mais qu'embellissaient
jadis les jardins du palais des Papes.
   Si, comme a dit le poète :
                Il faut à l'édifice un passé dont on rêve
                      Deuil, triomphe ou remords.

  Le palais des Papes a certainement tout ce qui lui faut. Ce
palais n'est plus que le triste témoignage d'une grandeur écli-
psée; nous avons visité ces ruines imposantes où vivent en-
core tant de souvenirs^ et nous ne saurions mieux retracer les
impressions profondes qu'il a laissées sur notre ame., qu'en
reproduisant ici le tableau vif et saisissant qu'en a donné
M. Edgar Quinet :