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474                EXCURSION DANS LE MIDI.
beaucoup plus sage ne pensait pas du tout au suicide, je vous
le jure. Après avoir bien soupe, il avait très-bien dormi; et le
lendemain matin de bonne heure s'étanl levé frais et dispos,
il demanda à la maîtresse de la maison la note de sa dé-
pense.
   — La voici, monsieur, dit l'hôtesse.
   — 300 francs! dit l'étranger en jetant les yeux sur le total
de ses dépenses... C'est un peu cher !... Mais je ne m e plains
pas, madame; votre chef de cuisine est un homme de talent,
et votre Château-neuf est sans reproche... Et puis, voyez-vous
j'avais une idée, je l'ai satisfaite : j'ai couché dans la chambre
du maréchal Bellune...
   — Brune, reprend encore le garçon en riant.
   — Vous avez raison , mon ami.
   Et le voyageur pria Mmo Cremieu d'écrire au bas de sa note
acquittée le nom du maréchal Brune, qu'il confondait tou-
jours, ajoula-l-il, avec le maréchal Bellune. Après quoi notre
homme partit aussitôt pour Paris. Car ce curieux touriste était
parisien; il était digne d'être anglais.
   Je vous ai raconté cette petite historiette comme on me
l'a racontée à m o i - m ê m e ; elle a cela de bon qu'elle nous
apprend jusqu'où peut aller chez certains individus la mala-
die des impressions de voyage et leur étonnante variété.
   Il faisait encore grand jour, le soleil dorait de ses rayons
les tours du Château des Papes et les murs crénelés de la
ville. Mon cicérone me proposa de continuer notre p r o m e -
nade, ce que j'acceptai avec empressement. Mais je ne vous
ai point dit quel était cet obligeant cicérone.
   A peine installé à l'hôtel, un jeune h o m m e , que je crois
être le fils de la maison, était monté dans ma chambre où
il avait déposé un grand portefeuille rempli de sépias, de
gouaches, d'aquarelles et de dessins au crayon représentant
des monuments hisloriques de la contrée ou quelques-uns
des riches paysages qui embellissent les rives du Rhône.
   Au bas de l'une des plus jolies aquarelles j'avais lu la