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 04                  CRITIQUE LITTÉRAIRE.

  toute faite : au temps même où il écrit le Peintre de Salz-
 bourg, il compose Le dernier Chapitre de mon Roman, livre
 qui pouvait plaire à la génération de l'Empire et encore au-
jourd'hui à ceux que le ton graveleux suffit pour intéresser,
 mais difficile à approuver, même en pardonnant beaucoup
 aux principes en faveur de l'esprit.
    Il n'y a donc, dans l'auteur à1 Adèle, ni la langueur morte,
 ni la tristesse incomparable d'Obermann ; il n'a point connu
 ces orages de l'ame plus grands que les tempêtes des élé-
 ments auxquelles René adressait ses sublimes et mélancoliques
 apostrophes. Nodier, éveillé en Werther, pour me servir de
 la belle expression d'un philosophe allemand, n'a jamais pu
oublier cette première apparition; mais, au fond, sa nature
 toute aimable et affectueuse était trop distraite à mille déli-
catesses d'amitié et d'amour, trop finement naïve, trop po-
sitive sous une apparence romanesque pour s'offrir en pâture
à ces douleurs tout idéales dont les élans hardis devaient
ressembler un peu pour lui à de la démence. Celte opinion
peut sembler étrange: Charles Nodier, un esprit positif!
lui, ce conleur ami de la fantaisie, l'auteur de Trilby, d'Inès
de las Sierras, et de ce bijou merveilleusement ciselé ap-
pelé le Songe d'or, lui qui en veul si fort a la science et
à la raison, et ne prétend relever que du sentiment? Oui,
en dépit de tout cela, ou plutôt, à cause de tout cela, sans
doute, il caresse l'imagination, A. la folle du logis il sa-
crifie volontiers les savants et les docteurs. —Rêver lui plaît:

           0 mes amis, quel plaisir de rêver,
           De se livrer au cours de ses pensées
           Par le hasard l'une à l'autre enlacées,
           Non par dessein : le dessein y nuirait.

Mais ses rêves, il les aime comme des rêves : il ne veut point
avoir l'air d'être leur dupe. Sa rêverie l'enchante et le con