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202        nE L'ÉTAT ACTUEL DE LA PHILOSOPHIE

n'a pleinement satisfait, ni le lecteur vulgaire, ni le penseur
spéculatif. S'il avait pris à tâche de composer un ouvrage
purement scientifique, la valeur intrinsèque de la publica-
tion et la cause elle-même de la vérité y auraient gagné.
   La publication la plus récente de Reichlin Meldegg est
une petite brochure anonyme, intitulée: Le Nouveau maître
Renard, et contenant huit fables philosophiques dirigées contre
Schelling. L'auteur nous raconte qu'après la mort du lion
(Kant) et de l'aigle (Fichte), qui successivement avaient régné
en rois-philosophes sur les animaux, alors encore très ama-
teurs de spéculations métaphysiques, un renard (Schelling)
se para de la crinière de l'un et des plumes de l'autre, se
mit à discourir avec emphase sur l'idéal, sur le réel, sur l'ab-
solu, et parvint ainsi à rassembler autour de lui des audi-
teurs respectueux , qui bientôt se déclarèrent ses humbles
sujets. Par une série de ruses, et en promettant toujours à
son peuple de l'élever à la contemplation de l'absolu, il sut
garder la confiance générale et le trône philosophique auquel
 on l'avait élevé, jusqu'au moment où l'ours (Hegel), dévoi-
 lant le néant des promesses royales, s'empara en tyran du
 pouvoir suprême. Dès lors, pendant que l'ours, afin d'assurer
 le succès de sa propre philosophie, dévorait tous les animaux
 qui osaient être d'un avis différent de celui du nouveau des-
 pote, le renard, qui s'était soigneusement caché, était at-
 tentif aux événements du jour, et se tenait toujours prêt à
 saisir la première occasion qui pût être favorable a ses projets
 rusés. A la mort de l'ours, il lui sembla que le moment était
 venu d'exécuter ses desseins. Une foule d'oursins mal léchés,
 et divisés entre eux essayaient alors, par différents manèges,
 de conserver l'influence puissante que leur père avait exercée
 sur les destinées de la philosophie. Ce fut en vain. A l'aide
 de la crinière et des ailes qui lui avaient déjà servi naguère,
 le renard, habile à remplacer les idées qui lui manquaient,