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UN VIEUX DE TRENTE ANS 8j plus petites dispositions de ia vie règimentaire; leurs caporaux, leurs sous-officiers et hélas! beaucoup de leurs officiers étant aussi inexpérimentés, aussi ignorants qu'eux mêmes ! Quant à nous, nous fûmes très heureux d'avoir Muller pour compagnon d'armes ; malheureusement nous ne le conservâmes pas assez longtemps. Le 2 novembre, à Roppe, au moment où les premiers coups de fusils se faisaient entendre, Henri Muller se trou- vait au milieu de la route qui traverse le village, à quelques pas de notre chef de bataillon et d'officiers qui cherchaient à se rendre compte de ce qui se passait. — Mon commandant, dit Muller, voulez-vous que je parte à la découverte ? — Allez et revenez vite, lui répondit l'officier. Muller partit au pas gymnastique et disparut au tournant de la route. Arrivé aux Errues, il trouva la première compagnie du bataillon aux prises avec un détachement de chasseurs badois. Au lieu de revenir en arrière rendre compte de ce qu'il avait vu et jugeant d'ailleurs que les estaffettes qu'il avait croisées en route avaient déjà suffisamment renseigné le commandant, Muller, saisi par l'odeur de la poudre et l'âpre plaisir de battre les ennemis qui foulaient le sol de sa chère Alsace, se glissa parmi les combattants et 'se mit à faire le coup de feu, de concert avec les mobiles du Rhône. En partie abrité par un arbre derrière lequel il tirait sur les Allemands comme il aurait tiré à la cib'e sur le champ de manœuvre, il visait avec soin, sans se presser, avec une précision remarquable ; presque tous ses coups portaient et il poussait des exclamations de joie, toutes les fois qu'il