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396 FËDOR ET LOUISE. Un gardien en habit bourgeois le suivait à une certaine distance. Bientôt il chercha un banc pour reposer ses jambes fatiguées. — Cet air frais et pur me fait du bien, et cependant je me sens accablé; combien de fois j'ai parcouru cette allée à grands pas? Combien je te remercie mon enfant, pour ton dévouement qui me procure pendant quelques heures le bonheur de la liberté ! Que Dieu te récompense puisque je ne le puis moi-même. Oh ! que la fleur de ces tilleuls a bonne odeur ! Comme le ciel est pur ! Où peut donc être votre bonne mère ? que Dieu la bénisse ! qu'il ne lui soit point arrivé quelque malheur. Louise, ne vois-tu personne de nos anciennes connaissances ? Ne remarque-t-on pas le gar- dien qui me suit? — Non mon père, personne ne vous sait ici ; on ne fait pas attention au gardien en habit bourgeois. — Où est donc Fedor? ne voulait-il pas être avec son père pour sa première sortie ? — Il a dit qu'il nous rejoindrait. — Ce garçon me donne de l'inquiétude ; on remarque que la direction paternelle lui manque. Mais allons plus loin, je me sens reposé. Ils marchaient lorsqu'ils rencontrèrent une foule joyeuse qui sortait d'une maison. — C'était une bonne farce dit l'un. Elle valait bien vingt francs dit l'autre. -- Eh bien, Fanny, les bêtes ont bien joué leur rôle, dit une dame à sa servante; ne dirait-on pas qu'elles sont douées de raison ? — La tante! mon père, la tante î celle qui est en robe violette. Dois-je l'appeler? — Berthe, sœur Berthe ! cria Barenbeck d'une voix tremblante. Elle double le pas, elle ne veut pas m'entendre î — Si l'un de ses chiens avait aboyé, elle l'aurait bien en- tendu, dit Louise avec amertume. — Hop ! cria un garçon qui faillit sauter sur Barenbeck. — Fedor ? es-tu donc aveugle que tu ne connais pas ton père ? Il s'arrêta honteux et dit : — je voulais vous chercher, je ne vous croyais pas ici. Ah père ! si vous aviez pu voir cette farce, vous