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204            NOTICE SUR LE BARON RAMBAUD.

   Il avait alors 72 ans ; il éprouvait le besoin du repos. Cin-
quante années de son existence avaient été consacrées aux
affaires publiques ; il avait acquis désormais le droit de vivre
pour lui.
   M. Rambaud emporta dans sa retraite toutes ses facultés
inlacles. Il n'avail rien perdu, dans sa verte vieillesse, ni des
grâces de son esprit, ni de l'aménité de son caractère. Une
expérience demi-séculaire qui avait touché à tous les événe-
ments de la révolution, une carrière publique qui l'avait rap-
proché de lous les grands personnages du temps, et, joints à
cela, un esprit naturellement aimable, une philosophie douce
et gaie, donnaient à sa conversation un caractère particulier,
plein tout à la fois de charme et d'instruction. Retiré au milieu
des tendres affections de sa famille, au sein des belles-lettres
pour qui il avait gardé toute sa sensibilité, et qui charmaient
sa retraite ; entouré des honorables souvenirs de son passé,
de l'estime de ses concitoyens et des respects du public, notre
compatriote rappelait involontairement le noble vieillard dont
Cicéron a fait le portrait dans l'un de ses traités immor-
tels.
    M. Rambaud jouit pendant dix-neuf ans de celle vie intime
et douce ; il fut le premier a en pressentir la fin. II venait de
passer les beaux jours de l'automne, avec sa famille, à Vour-
les, dans une campagne qu'il affectionnait surtout : le moment
du retour à la ville était venu, on allait partir ; la voiture qui
devait ramener M. Rambaud et ses enfants attendait dans la
cour, il allait y monter ; loul-à-coup il ordonne de suspen-
dre le départ, remonte dans son appartement, s'en fait rou-.
vrir les portes : il veut, dit-il, jouir une dernière fois de ce
beau paysage qu'il a tant aimé! Après un moment de con-
 templation muette et solennelle, il s'arrache à ce spectacle, et
 rejoint sa famille. Ce funèbre pressentiment ne le trompait pas;
 à peine revenu à Lyon, sa santé s'altéra ; bientôt ses forces