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400 FEDOR ET LOUISE. sottes choses, ont aussi inventé la mode d'anglaiser; ils ont dé- couvert que le bon Dieu n'avait pas bien fait les chevaux. Au lieu de leur donner une longue queue, sans doute pour chasser les mouches, ils trouvent mieux qu'elle soit courte et retroussée ; on coupe la queue du cheval en dessous, on la relève, on en re- tranche une partie, et on brûle les plaies avec un fer rouge pour les cicatriser ; oui, oui, on dirait que le bon Dieu ne fait rien de bien pour l'homme et que celui-ci a encore le droit de le blâmer. Louise qui était allée auprès de son père rentra plus tard que de coutume ; il pouvait être dix heures du soir : Fedor dormait déjà ;Louise se coucha aussi. A peine était-elle au lit qu'elle fut effrayée par un petit gémissement qui partait du lit de son frère ; elle écouta et reconnut les cris d'un petit chien ; les plaintes cessèrent, puis recommencèrent à différentes reprises. Louise supporta cette musique avec patience , mais Fedor qui s'était ré- veillé commença à gronder. —Veux-tu te taire ! maudite bête ! cria-t-il, en le secouant par le cou ; comme il hurlait plus fort, il le saisit et le jetta hors de la porte, où les gémissements continuèrent encore longtemps. Lorsque Fedor se fut endormi, Louise se leva et vit le chien qui, tout tremblant, cherchait une place pour se coucher ; enfin Louise le prit, et il resta tranquille après qu'elle l'eût placé sur le pied de son lit. Le matin, lorsque Louise examina le chien, elle vit avec hor- reur qu'on lui avait coupé les oreilles et la queue, les plaies, encore fraîches, avaient ensanglanté tout son lit. — Misérable frère ! s'écria-t-elle, que dirais-tu si on te coupait un doigt? Et toi tu es si barbare avec cette pauvre bête parce qu'elle se plaint ! Louise sentait avec chagrin que son amour pour son frère di- minuait chaque jour, surtout lorsqu'il maltraitait son chien, sous prétexte de le dresser. Elle voyait également que la tendresse de son frère pour elle et pour son père diminuait progressivement.