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140                       DES LETTRES

lin qui, habitué à discerner le beau de ce qui ne l'est pas,
aura acquis ce goût dont la lumière nous guide dans toutes
les circonstances de la vie. Or, n'avons-nous pas vu que ces
qualités de l'homme moral, les lettres les font naître, et que
les sciences ne sauraient les produire.
   Je pourrais m'arrêter là, tant la démonstration me semble
évidente et rigoureuse ; mais je veux la fortifier par un der-
nier ordre de considérations.
   Un résultat constant vous a frappé dans le cours de ces
études : c'est l'accord qui,dans des points très-essentiels, existe
entre les idées des grands écrivains du paganisme et les idées
chrétiennes. Mêmes vues sur la vigilance, sur la justice et
l'action incessante de Dieu ; sur la nécessité de fléchir sa
colère et d'en obtenir le pardon de nos fautes ; mêmes préoc-
cupations de la nature morale de l'homme ; même subordi-
nation de la nature physique. Dans les lettres, comme dans le
Christianisme, les idées de devoir, de bien et de mal forment
le fond de l'enseignement ; et le beau moral est encore plus
exalté que le beau intellectuel.
   Cet accord est digne de remarque. 11 explique comment
celui qui est pénétré des lettres antiques est plus préparé
à comprendre et a pratiquer le culte et la morale du Chris-
tianisme, que celui qui n'a étudié que le cours des astres
ou les phénomènes moléculaires des corps
   Nous arrivons ainsi par des voies différentes, mais éga
lement sûres, aux idées que Mgr. Dupanloup a exprimées
avec tant d'éclat dans son discours de réception à l'Acadé-
mie française ; nous comprenons avec lui « pourquoi, sauf
peut-être à la première origine du Christianisme où il
importait que tout fût miraculeux et divin, toujours l'Eglise
a recherché, aimé, honoré les lettres humaines... Pourquoi?
 Dieu lui réservait la gloire de devenir elle-même l'institutrice
des nations, d'enseigner la grammaire et la rhétorique, le




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