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322                         FRÉDÉRIC OZANAM.
   Ce fut pendant son cours de droit que Frédéric Ozanam fonda,
en compagnie de sept autres étudiants, cette société de Saint-
Vincent de Paul qui a pris depuis une si grande extension en
France et dans les pays étrangers. Quelques mois avant sa mort,
Ozanam rappelait à Florence, dans une conférence nouvellement
établie, les humbles commencements de cette vaste association.
Nous le laisserons parler lui-même .-

   « J'ai besoin de vous dire que ce n'est point par mon mérite personnel
que je suis devenu vice-président du conseil général de Paris, mais unique-
ment à cause de mon ancienneté. Vous voyez, en effet, devant vous, un des
huit étudiants qui, il y a vingt ans, en mai 1833, se réunirent pour la pre-
mière fois, sous la protection de saint Vincent de Paul, dans la capitale de
la France.
   « Nous étions alors envahis par un déluge de doctrines philosophiques et
hétérodoxes qui s'agitaient autour de nous, et nous éprouvions le désir et
le besoin de fortifier notre foi au milieu des assauts que lui livraient les sys-
tèmes divers de la fausse science. Quelques uns de nos jeunes compagnons
d'études étaient matérialistes, quelques uns saint-simoniens, d'autres fou-
riéristes, d'autres encore déistes. Lorsque nous, catholiques, nous nous ef-
forcions de rappeler à ces frères égarés les merveilles du christianisme, ils
nous disaient tous : « Vous avez raison si vous parlez du passé ; le christia-
« nisme a fait autrefois des prodiges, mais aujourd'hui le christianisme est
« mort. Et, en effet, vous qui vous vantez d'être catholiques , que faites-
c vous ? où sont les œuvres qui démontrent votre foi et qui peuvent nous
 e
« la faire respecter et admettre ? »
   « Ils avaient raison ; ce reproche n'était que trop mérité. Ce fut alors que
nous nous dîmes : « Eh bien ! à l'œuvre ! et que nos actes soient d'accord
« avec notre foi ! Mais que faire ? que faire pour être vraiment catholiques,
« sinon ce qui plait le plus à Dieu ? Secourons donc notre prochain comme le
« faisait Jésus-Christ, et mettons notre foi sous la protection de la charité. »
   « Nous nous réunîmes tous les huit dans cette pensée, et. d'abord même,
comme jaloux de notre trésor, nous ne voulions pas ouvrir à d'autres les
portes de notre réunion. Mais Dieu en avait décidé autrement. L'association
peu nombreuse d'amis intimes que nous avions rêvée devenait, dans ses
desseins, le noyau d'une immense famille de frères qui devait se répandre
sur une grande partie de l'Europe. Vous voyez que nous ne pouvons pas
nous donner véritablement le titre de fondateurs : c'est Dieu qui a voulu et
qui a fondé notre société. »