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PÉLOPONÈSE. 69 commerçants de toute espèce, les agriculteurs et les oisifs ; on chante, on fume, on boit avec la gaité et le bruit particuliers aux Grecs. Parmi la foule , on reconnaît aisément çà et là un capi- taine maïnotte à sa haute stature, à sa démarche fière, au sabre courbé qui traîne sur ses talons et à la martiale richesse de son costume. Je descendis à l'hôtel de la jeune Grèce, où je fis un déjeûner qui aurait pu être au-dessus du médiocre si j'avais ac- cepté l'offre que me fit mon hôte de m'apporter un vin de Cham- pagne de qualité supérieure. Je refusai par une méfiance dont je me repentis, lorsque mon guide m'eut appris comment ce vin avait été transporté là , et comment un Anglais même l'avait as- suré n'en avoir jamais bu de meilleur. Ce Champagne provenait en effet d'un navire marchand qui avait été jeté sur la côte et pillé par les pirates de Mani, qui en vendirent en détail la car- gaison. III. MISTHRA. De Sparte je gagnai rapidement Misthra par des chemins sablés et tracés tantôt dans une forêt d'oliviers, tantôt dans un bosquet de citronniers. Je me dirigeai directement vers les ruines de la Misthra du moyen-âge, sans m'arrèter à la ville ac- tuelle. Misthra, qui fait partie du Magne oriental, fut construite au XIIIe siècle par Villehardouin, chef de croisés. Après lui, une convention particulière la fit passer pour quelque temps au pouvoir des empereurs de Bysance ; les Français et les Vénitiens y dominèrent encore tour à tour, et les Turs en furent les der- niers possesseurs. Elle est construite sur un piton conique d'une grande élévation ; sa blanche citadelle, qui déroule sur son som- met les contours capricieux de ses murailles crénelées, et l'en pare comme d'un collier de dentelles, semble contenir encore dans son enceinte presque intacte les troupes des croisés surveillant les dangereux défilés de la Messénie. Au bas de la citadelle, une