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230 ÉTUDE SUR FRAYSSINOUS. conscription militaire, et Fouché , voyant la répugnance de la jeunesse à se courber devant les lois de la conscription, n'avait rien imaginé de mieux que d'en faire prêcher les charmes par l'orateur de Saint-Sulpice. Il ne voulut pas avilir son ministère à ce point. Fouché, dans sa colère, l'accusa de prêcher le cago- tisme et les pratiques superstitieuses. Il n'y avait pas même à de tels reproches une ombre de vraisemblance, l'orateur n'ayant abordé encore ni les mystères, ni les exercices de la religion chrétienne ; mais un terroriste, un athée, ne pouvait pas y re- garder de si près, et les conférences furent sur le point d'être supprimées, lorsque Portalis écrivit au ministère de la police gé- générale (17 mars 1807) en faveur de l'abbé Frayssinous. Il n'eut pas de peine à le justifier ni à montrer ensuite combien l'orateur ferait suspecter son ministère, s'il transportait dans la chaire évangélique des intérêts et des questions de ce genre. Napoléon se trouvait alors à la tète de ses armées. Apprenant du ministre des cultes les difficultés suscitées à Frayssinous, il défen- dit de l'inquiéter ; on fit néanmoins entendre à l'orateur qu'il aurait dû parler avec éloge du chef de l'Etat. H ne pensa pas, cette fois, et avec raison, qu'il dût compromettre le succès de ses Conférences , en refusant quelques paroles d'hommage à celui qu'on avait salué assez souvent du nom de Cyrus ; mais il se borna à remercier Dieu de s'être servi de cette puissante main pour relever les autels et rapprocher le peuple français de la foi desespères. Les Conférences de 1808 furent employées au développement des grands principes de la loi naturelle , à la démonstration de ces vérités premières que l'on trouve au fond de toutes les socié- tés, et que des ténèbres plus ou moins épaisses peuvent bien ob- scurcir, mais ne sauraient entièrement voiler. C'est tout à la fois le domaine de la philosophie et celui de la théologie. L'orateur, sans être métaphysicien profond , se montre néanmoins suffi- samment versé dans son sujet; il paraît à l'aise, il n'hésite pas, il est sûr de ce qu'il dit, le dit en bons termes, déployant une douce^chaleur, et parfois même du coloris. La sphère qu'il par- court n'est pas très-vaste, mais il s'y meut avec facilité et natu-