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220 ÉLOGE DE LOUIS-GABRIEL SUCHET. qui la font mieux connaître que tout ce qu'on pourrait dire : « Il n'y a pas de consolation pour une douleur comme la « mienne ; elle sera éternelle et comparable au bonheur que « j'ai éprouvé pendant dix-sept ans. J'ai besoin de la vue de « mes trois enfants pour me donner la force de vivre , car le « plus grand bienfait du ciel à présent pour moi, serait dans « ma réunion à l'être parfait que je pleurerai toute ma vie. « Mais je dois élever mon fils de manière à porter digne- « ment un si beau nom ; c'est une grande tâche pour lui, et « c'est moi qui dois lui en faciliter les moyens » Ces nobles expressions font revivre dans l'illustre veuve les mœurs de ces antiques romaines qui contribuèrent si puis- samment à la gloire de la patrie, en faisant l'éducation de leurs fils. La noble mère du jeune Suchet n'a rien épargné, dans le temps, pour bien remplir ce devoir important. Le succès nous dispense de nous étendre sur ce qu'elle a fait à cet égard ; et il nous serait d'autant moins permis de l'oublier, que nous jouissons aujourd'hui des fruits de ses soins maternels. M. le duc d'Albuféra siège dignement depuis quinze ans dans les assemblées du pays. Nous avons dit que le maréchal Suchet s'était occupé, dans les dernières années de sa vie , de rédiger ses Mémoires ; ils furent publiés après sa mort par les soins d'une épouse qu'il associa toujours à sa gloire. Elle les présenta à la famille, le 19 janvier 1829. Cet ouvrage caractérise un guerrier émi- nemment civilisateur; il est plein d'idées neuves et d'aperçus profonds. Le maréchal raconte, de 1808 à 1814, ses campa- gnes, les guerres où il se montra acteur principal, comme on l'a vu faire à tel autre capitaine de haute intelligence. Ses r é - flexions sur la guerre y sont d'une justesse qui frappe l'esprit du lecteur. Sa marche est rapide, sa manière d'écrire révèle souvent une imagination poétique , et sa pensée passe avec