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               ÉLOGE DE LOUIS-GABRIEL SUCHET.                203

ces arrière-pensées menaçantes qu'on imagine pour les
combattre ; de l'autre , la Péninsule , sympathisant avec la
France, vivant de ses idées, profitant de ses exemples , et
se tournant vers elle â tous ses moments de détresse , sans
craintes chimériques ; les deux pays , en un mot , dès long-
temps portés à resserrer une union commandée par leurs
penchants naturels, par des nécessités politiques et utiles, en
même temps, au développement de leurs intérêts matériels.
Napoléon lui-même sentit aussi la nécessité politique ; mais,
au lieu de faire de l'ibérie une alliée, il voulut en faire une
conquête : méprise énorme. Après ses revers , il s'est accusé ,
avec cette magnifique naïveté du génie à qui toute erreur
pèse , d'avoir méconnu cette noble nation.
    Sous ce double point de vue , la marche de Suchet valut
 au nom français une renommée sérieuse de subordination ,
d'honneur et d'humanité. Aussi celle guerre reslera-t-elle
 le modèle des guerres qui ne portent pas la dévastation avec
elles. Les mains de Suchet reslèrent toujours pures après
avoir manié les deniers de l'armée , après avoir disposé en
conquérant des tributs du commerce , des richesses de la
Péninsule. Il épargna aux provinces espagnoles , dont le
gouvernement lui avait été confié, les horreurs du pillage ,
et fit distribuer aux hôpitaux , aux indigents et à ses soldats
les sommes considérables que les autorités du pays avaient
voulu lui faire accepter par reconnaissance. — « Ce qui est
« permis aux autres, répétait-il, ne l'est pas à ceux qui
« commandent des soldais. »
    Ses actes furent toujours empreints d'un sentiment naturel
de générosité, et lui valurent ce respect et celle vénération
dont le souvenir règne encore en Espagne. Cette disposition
affectueuse et celle noblesse de sentiments lui cpncilièrenl
toutes les populations qu'il fut appelé à gouverner.
    Il était l'idole des soldats, qui le comparaient au Chevalier