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ÉLOGE DE LOUIS-GABRIEL SUCHET. 123 bas les armes. Elle fut ainsi préservée du pillage, du carnage, desflammeset de toutes les horreurs qui suivent un assaut. Ce quifitle plus d'honneur a Suchet en cette occasion, ce fut d'avoir cherché à atténuer les malheurs de la guerre en diminuant les résistances par la justice , la modération et la prudence. Ainsi qu'on le voit, cette capitulation était en même temps la prise d'une armée : c'était la seule qu'eussent les insurgés dans les provinces orientales : elle était composée de leurs meilleurs généraux et de toutes les troupes régulières qui restaient à l'Espagne, c'est-à -dire, de 17,500 hommes d'in- fanterie, et de 1800 hommes de cavalerie , ayant 93 chefs à leur tête. 374 bouches à feu et 21 drapeaux devenaient les trophées de la victoire. Le général en chef Black, né dans ces contrées , perpétuait la guerre civile par l'autorité que lui donnaient son nom, ses services et sa fortune; ce général était considéré comme l'un des meilleurs chefs d'armée qu'eût révélé la guerre de l'in- dépendance espagnole. O'Donnel, Zayas, Lerdizabal et Ve- lasco disposaient après lui des passions de la multitude ; et, faits prisonniers, ils emportaient en France la dernière espérance des insurgés , qui ne comptaient désormais ni chefs, ni troupes , ni places, depuis les frontières de la France jusqu'à celles du royaume de Murcie. Quelle que fût l'importance de la conservation de Valence, on ne la dé- fendit point avec l'opiniâtreté dont les habitants de places beaucoup moins considérables avaient précédemment donné l'exemple. C'était alors une preuve que l'enthousiasme et la colère des peuples cédaient enfin aux leçons de l'expérience et de la raison. L'esprit d'insurrection, sensiblement refroidi, était au moment de s'éteindre ; et ce résultat était dû non seulement aux armes du maréchal Suchet, mais à la sagesse qui dirigeait sa conduite, a la modération qui dictait ses me- sures, a la fermeté qui en soutenait l'exécution.