page suivante »
122 ÉLOGE DE LOUIS-GABRIEL SUCHET. Sa bravoure et son humanité étaient devenues proverbiales. La sensibilité du cœur s'allie ainsi dans le guerrier moderne à l'impétuosité du courage. Il veut la victoire en masse, les détails du carnage lui font horreur et pitié. Suchetdonc qui aspirait non pas à la gloire des dévastateurs, mais à celle des bienfaiteurs des peuples, ayant fait jeter quelques bombes dans la place, fit une dernière tentative pour amener une reddition volontaire ; il écrivit au général en chef Black celte lettre qui rappelle la prudence du héros, la main du civilisateur, l'épée du guerrier , et dont les termes méritent d'être consacrés par l'histoire : AU CAMP DEVANT VALENCE, Le 6 janvier 1812. MONSIEUR LE GÉNÉRAL , Les lois de la guerre assignent un ternie aux malheurs des peuples ; ce terme est arrivé : aujourd'hui l'armée impériale est à dix toises des corps de votre place ; dans quelques heures , plusieurs brèches peuvent être ouver- tes, et dès-lors un assaut général doit précipiter dans Valence des colonnes françaises; si vous attendez ce terrible moment, il ne sera plus en mon pou- voir d'arrêter la fureur du soldat, et vous seul répondrez devant Dieu et de vant les hommes des maux qui accableront Valence. Le désir d'épargner la ruine totale d'une grande ville me détermine à vous offrir une capitulation honorable. Je m'engage à conserver aux officiers leurs équipages, à faire res- pecter la propriété des habitants. Je n'ai pas besoin de dire que la religion que nous professons sera réservée et ses ministres protégés. J'attends votre réponse dans deux heures, et vous salue avec une très- haute considération. Signé: Le maréchal SUCHET, Black lui répondit que son armée saurait soutenir l'hon- neur du nom espagnol, aidée qu'elle était par la constance d'un peuple résigné à tous les sacrifices. La ville , après avoir beaucoup souffert, capitula. Le 9 janvier, elle ouvrit ses portes, et vingt mille hommes mirent