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                   BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.                     87

 L'amour-propre y trouvait d'ailleurs si bien sou compte!
   Du reste, ce double mal n'est pas, Dieu merci, sans remède.
Si, grâce à la paix et à notre sécurité, les études littéraires ac-
quièrent de la force, de la profondeur et de la solidité ; si l'en-
seignement historique s'y mêle dans une sage mesure et sans
abus , on peut être assuré que les esprits retrouveront tout leur
ressort, qu'ils ne seront plus énervés par l'absence de l'émula_
tion, et que nous verrons renaître ce goût si désirable des recher.
ches historiques aux sources mêmes où la vérité se complète.
   On parait étonné qu'Aymar ait écrit en latin. Ce n'était certes
pas pour trancher du Tite-Live, mais bien par nécessité. Alors
tout ce qui avait rapport à l'histoire ne s'écrivait qu'en latin. On
sait que la langue française n'était point formée. Dans les pro-
vinces du sud-ouest de la France elle l'était moins qu'ailleurs.
Montaigne, qui est né plus de quarante ans après Aymar du Ri-
vait, renferme encore des traces profondes du vieux langage ; et
cependant Montaigne avait vécu à Bordeaux et à ï'aris et il put
profiter del'ordonnance de Villers-Coterets (1538) et de l'impulsion
que François Ier donna à la culture de la langue nationale. S*
Aymar avait écrit dans la langue vulgaire de son temps et de son
pays, il serait demeuré presque indéchiffrable pour la postérité.
On objectera peut-être l'exemple de Philippe de Comines qui l'a
précédé d'un demi-siècle. Mais on sait que le français qui a pré-
valu est celui qui se parlait dans le nord de la France et particu-
lièrement à Paris , séjour ordinaire de la cour ; or, Philippe de
Comines était né dans la Flandre ; il n'a vécu qu'à la cour de
Bourgogne et à la cour de Louis XI et de Charles VIII, c'est-à-
dire là où le nouveau français se parlait le mieux : enfin, nous
ne ferons nulle difficulté de reconnaître , si l'on veut, que Phi-
lippe de Comines était écrivain plus habile. On pourrait à plus
forte raison citer Villehardouin, historien et héros de la croisade
de 1204 ; mais il était champenois, et l'on sait que, dans l'édi-
tion de ses Œuvres, donnée par Du Cange , son style a été un
peu rajeuni.
   Aymar ne pouvait écrire qu'en latin. 11 dit lui-même (liv. Ier,
chap. xxvi) que, taudis qu'il étudiait la grammaire à Romans,