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86 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. vient la passion de tous les esprits élevés. Depuis environ vingt- cinq ans, on a ainsi exagéré l'étude de l'histoire dans les pro- grammes des écoles publiques. Les hommes soumis les premiers à ce système d'études, ont actuellement plus de quarante ans. Qu'on examine. A quelques exceptions près, qu'ont-ils fait de bien notable ? Il est à remarquer que le goût du romanesque a précisément été surexcité depuis cette époque. Les hommes qui ont fait des œuvres solides et durables, MM. Augustin et Amédée Thierry, Ferrand, Guizot, de Barante, Ozanam, Thiers, Lamar- tine, quoiqu'avec des succès divers, avaient sans doute appris dès leur enfance à connaître l'importance de l'histoire ; mais ils n'avaient pas été élevés sous le régime dont nous parlons. C'est que la connaissance de l'histoire est l'étude de toute la vie et exige beaucoup de maturité. La seconde cause est plus délicate. L'enseignement historique a eu son côté défectif. Des hommes qui croyaient bien connaître toutes les circonstances des événements et la situation vraie des personnages historiques, ont appliqué au passé une critique souvent hasardée ; ils ont prodigué l'éloge et le blâme ; mais plus souvent le blâme que l'éloge ; ils ont attaqué et censuré des gloires universellement reconnues ; ils se sont exposés à flétrir bien des renommées légitimement acquises ; ils se sont plu à exagérer les misères de nos ancêtres ; ils ont trop souvent pris l'autorité pour point de mire de leurs critiques ; tils ont fait croire qu'ils approfondissaient, qu'ils allaient droit à des vérités inconnues, quand ils ne montraient qu'une face des faits, et souvent la face la moins honorable pour l'humanité. Ces hom- mes ont fait école ; ils ont fait germer la présomption au sein des contemporains, qui auraient bien quelques raisons d'être modestes ; ils ont conduit, ou peu s'en faut, la génération qui s'élève à croire que, comparativement à nos aïeux, nous sommes doués de la suprême sagesse. Dès lors, le dédain du passé devait remplacer le goût des recherches historiques, et tout naturelle- ment on a trouvé plus commode d'adopter les jugements qu'on avait reçus tout faits que de recourir aux sources historiques ponr savoir ce qu'on devait penser des hommes et des choses.