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472 EXCURSION DANS LE MIDI. à l'hôtel du Palais-Royal, chambre n° 5. Celte chambre est celle où se passa l'affreuse tragédie que nous avons racontée. Je pourrais citer des descriptions fabuleuses faites sur la chambre n° 5, laquelle, je dois vous le dire, ressemble exactement à toutes les autres chambres d'auberge. Quelques-uns de ces écrivains impressionnables, s'abandonnant aux trop faciles écarts d'une imagination rétrospective, ont complaisamment suivi sur la muraille les traces des balles qui n'y existent pas ; ils ont compté sur le carreau les taches de sang, et là où il n'y en avait pas ils ont eu la bonté d'en mettre ; comme si la vérité n'était pas assez horrible et la tragédie assez impie! Depuis qu'on lui a rapporté toutes ces choses, M < «= Crémieu, la maîtresse de l'hôtel, a jugé qu'elle ne pouvait faire moins que d'appeler cette chambre n° 5, la chambre des poètes. Du reste cela n'engage à rien le voyageur ; plus d'un honnête bonnetier s'y est endormi paisiblement après M. Alexandre Dumas. En voici la preuve : C'était quelques jours avant mon arrivée à Avignon, un Monsieur —je regrette de ne savoir pas son nom — était des- cendu à l'hôtel du Palais-Royal. — Madame, dit-il en entrant à la maîtresse de la maison, est-ce bien ici qu'on a tué le maréchal, le maréchal... Bellune? — Monsieur veut dire le maréchal Brune. Hélas ! oui, Mon- sieur, c'est ici, répond l'hôtesse. — J'en suis charmé, fit l'autre préoccupé d'une seule pensée et de l'air radieux d'un homme à qui l'ont vient de retirer une incertitude poignante. —Le voyageur craignait, en effet, de s'être trompé d'hôtel. Complètement rassuré à cet égard: je voudrais voir, dit-il, la chambre où l'on a tué le maréchal Bellune. — Brune, reprend un garçon avec un sourire goguenard. — Bellune, Berune, peu importe. — On va nïonlrer la chambre à monsieur, dit poliment Mn,e Crémieu.