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                        EXCURSION DANS LE MIDI.                               463
 trouvais à Paris où je réside le plus habituellement. J'appris indirectement
 que le cadavre de l'illustre victime avait été jeté par les flots sur le territoire
 du Mas-des-Tours, domaine que je possède sur le bord du Rhône entre Arles et
 Tarascon. Peu de jours après, je sus que la famille de M. le maréchal avait
 le projet d'envoyer un ami à la recherche de ses restes précieux. Je fis dire
 à cette famille que je pourrais peut-être lui fournir des renseignements impor-
 tants à ce sujet. En conséquence de ma proposition, madame la maréchale
 voulut bien témoigner le désir de me voir, et j'eus l'honneur de lui être pré-
 senté. Nous convînmes que j'écrirais à une personne sûre qui ferait faire sur
 les lieux les recherches nécessaires. Ce correspondant me répondit bientôt
 que le cadavre du maréchal, après avoir été apposé plusieurs jours sur les
 bords du fleuve, avait été enfin recouvert d'un peu de terre, par un inconnu
 que l'on croit être un des gardes-champêtres du quartier; mais qu'il était à
 craindre qu'à la moindre crue du fleuve le cadavre ne fût encore laissé à dé-
couvert. Il s'agissait donc de trouver un homme de peine qui pût le mettre
en lieu de sûreté. J'en chargeai Berlandier, mon jardinier du Mas-des-Tours,
 qui, nuitamment et aidé d'un pauvre pêcheur des environs, procéda au trans-
port du cadavre, et alla l'inhumer profondément dans un fossé qui entoure le
jardin de mon domaine. Celte opération eut lieu à la fin de 1815, et les
choses restèrent dans cet état jusqu'en 1817, que je fus moi-même à Arles,
où je n'avais point paru depuis la mort de M. le maréchal. A cette époque, et
d'après l'engagement que j'en avais pris, je procédai moi-même à une nou-
velle exhumation de la manière suivante -.
    Quelques jours avant de quitter la Provence, le 5 décembre 1817, à onze
 heures et demie du soir, je me rendis au jardin de mon domaine du Mas-des-
 Tours, où j'étais arrivé le matin. J'étais accompagné de mon homme d'affaires,
 Louis Arnaud, habitant de la ville d'Arles, de François Monclergeon, mon valet
 de chambre, tous deux soussignés avec moi, et de Berlandier, mon jardinier,
 lequel ne sait point signer. Ils portaient une lanterne, des pioches et des
pelles. Arrivés au fossé extérieur du jardin, dans la partie au levant qui borde
 le puits à roue, nous reconnûmes l'endroit où Berlandier nous dit avoir déposé
 le corps, à l'exhumation duquel je fis procéder en ma présence et en celle
des soussignés. Au bout d'une demi-heure nous découvrîmes un cadavre
d'une taille au-dessus de l'ordinaire, et que Berlandier déclara être bien le
même qu'il avait déposé au même endroit deux ans auparavant : les pieds
étaient tournés au nord, la tête et les bras étaient en squelette, mais le reste
du corps était encore à peu près entier. Son énormité et l'odeur de putréfac-
tion qu'il répandait me firent craindre de ne pouvoir exécuter la promesse
que j'avais faite de le rendre à sa famille. Après avoir réfléchi un moment sur