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422                 DISCOURS D'OUVERTURE

tous les hommes sans exception veulent croire quelque chose
relativement à leur nature , à leur destination , à leurs rap-
ports avec l'être premier d'où ils dérivent. Tant qu'elle n'est
en possession d'aucune affirmation sur ces grands problèmes,
l'intelligence flotte incertaine , tourmentée par une profonde
et continuelle inquiétude. Si donc la philosophie n'était pas
à même d'apaiser celte grande et légitime inquiétude, si
elle ne pouvait rien répondre à toutes ces questions auxquelles
l'espèce humaine entière veut une réponse , c'est en vain
qu'elle prétendrait régner sur les intelligences et étendre son
empire au delà de l'enceinte de quelques écoles de sceptiques
indifférents.
    Mais, à mesure que l'intelligence se développe, à côté du be-
soin de croire , se manifeste le besoin de se rendre compte
 de sa croyance , le besoin d'examiner. Dès lors nulle vérité
n'obtient de notre esprit une adhésion entière et sans réserve,
si elle n'a été préalablement reconnue comme telle et contrô-
 lée par notre raison. C'est de ce dernier besoin que la philo-
sophie tire son origine, et incontestablement elle lui donne
toute la satisfaction dont il est susceptible. Mais le satisfait-
 elle seul à l'exclusion du besoin de croire, comme quelques
uns semblent le penser, tandisqu'a la religion seule appar-
tiendrait de satisfaire le besoin de croire?
    Jamais je n'ai pu comprendre cette antithèse si fréquem-
ment , si complaisamment reproduite entre la philosophie,
satisfaisant le besoin d'examiner et la religion satisfaisant le
besoin de croire ; comme s'il existait un antagonisme naturel
entre chercher ou sonder une vérité, et affirmer cette vérité !
    Il y a harmonie parfaite et non antagonisme entre ces
deux besoins de l'intelligence humaine, loin de se faire la
guerre ils se prêtent un mutuel secours et ne peuvent se sa-
tisfaire l'un sans l'autre. En effet, d'une part, l'examen ne se
suffit pas à lui-même , il est seulement la voie qui conduit Ã