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310 BULLETIN THEATRAL. sourde et empreinte de monotonie, et cela par la préten- lion de l'artiste à vouloir faire ressortir chaque mol. 11 en est pourtant des mots d'une phrase comme des plans d'un paysage ; chacun doit avoir sa place et sa valeur. Si vous Ses mettez tous en lumière, aucun d'eux ne nous frappera. Bocage, en cherchant ainsi à faire valoir les détails, étouffe un peu trop la majesté du vers et l'ensemble de la tirade. Ce défaut a été très sensible, au second acte. M1,e Léonie Darmont a révélé, dans un genre neuf pour elle, une pro- fonde intelligence °t d'excellentes intentions tragiques. Elle est admirablement servie par un organe sonore et sympa- thique. Nous croyons cette artiste appelée à de véritables succès dans cette voie, si elle veut se livrer à de sérieuses études. Tout a été dit depuis longtemps sur l'œuvre de M. Ponsard. La représentation n'a fait qu'ajouterai 1 estime que nous avions conçue pour Lucrèce, à deux lectures successives, et nous avons toute confiance dans l'avenir littéraire de son jeune auteur. Sa poésie, nourrie à de bonnes sources, est simple et précise dans sa forme. Elle procède à la manière de Corneille, et va toujours droit à son but. Lyon doit s'enor- gueillir à juste litre d'avoir, dans la môme année, fournit à la France deux poètes comme MM. Ponsard et Viclor de Laprade. Le théâtre des Célestins mérite, à son tour, d'occuper notre attention. 11 nous a, depuis un mois, causé plus d'une sur- prise, sans compter le délicieux vaudeville par lequel Scribe vient de faire sa rentrée au Gymnase. Procédons par ordre, et commençons par les Surprises de Scribe. A cette intriguo Une et spirituelle qui se déroule avec facilité au milieu de la gaîté croissante du public, on reconnaît bien vite la main exercée qui nous a donné tant de piquants tableaux de mœurs, tant de gracieux vaudevilles, et ce dernier ouvrage est bien digne de ses aînés. L'analyser serait enlever au lec- teur tout le plaisir que donne l'inattendu. Celte pièce est jouée avec beaucoup d'ensemble et de verve par tous les arlïstes. Nous mentionnerons pourtant M. Lambert, qui s'y montre comédien spirituel et qui nous a rappelé Ferville. Une autre surprise, surprise réelle, à laquelle depuis long- temps nous ne sommes plus accoutumé, c'est celle que nous a causé l'apparition trop courte, il est vrai, de Madame Fleury dans la Marquise de Pretinlaille. Esprit, grrtce, dis-