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25G                    ASCENSION AU MONT-BLANC.

      « On monta néanmoins, et à deux heures on arriva au sommet. Sur son
revers méridional, l'air était calme et le soleil chaud. Chacun se sentit ranimé,
quoique la température de l'air à l'ombre (Vil à S" au dessons de zéro du
thermomètre centigrade, et à — ( > 3 au soleil.
                                            *°
      « Le froid aux pieds était très pénible, car à la surface la neige avait
aussi une température de 8° au dessous de zéro, et à un pouce elle était à —
 I I ° . Le baromètre se tenait à 424 millimètres et 25 centièmes. La tempéra-
ture de l'air, celle de la neige à diverses profondeurs, celle de l'eau bouillante,
 la mesure de l'intensité magnétique, la détermination des angles de posi-
tion des montagnes les plus remarquables qui se trouvent entre le Mont-Rose
et les Alpes du Dauphiné, l'appréciation de l'humidité atmosphérique, l'é-
tude des phénomènes physiologiques produits par la raréfaction de l'air, occu-
pèrent les observateurs jusqu'à G heures 5o minutes.
      « Cependant le soleil s'abaissait vers un horizon d'un rouge de sang ;
l'ombre du Mont-Blanc se projetait sur l'atmosphère du côté de l'orient comme
un cône gigantesque ; en même temps la lune se levait, sans paraître plus
grande qu'au zénith ; elle était d'un jaune doré, qui contrastait avec le ciel
noir. Le thermomètre descendit aussitôt à 12 0 au dessous de zéro; la surface de
la neige a — 1 8 0 . Le vent fraîchissait, et le froid devenait intolérable. Il fallut
partir, et, en moins d'une heure, on était de retour à la tente du Grand-Plateau.
      « Ces Messieurs y séjournèrent jusqu'au i o r septembre, à midi. Leurs ob-
servations portèrent principalement sur la météorologie de ces régions, savoir :
la chaleur des rayons solaires, mesurée avec le pyrhéliomètre de M. Pouillet;
celle du rayonnement nocturne et diurne, par l'actinomètre du même phy-
sicien ; l'inclinaison de l'aiguille aimantée ; les variations diurnes et nocturnes
du baromètre et du thermomètre; l'intensité du son; les phénomènes phy-
siologiques résultant d'un séjour prolongé à 12,000 pieds an dessus de la m e r ;
l'étude de la nature de la neige, sa conversion en glace ; celle des ava-
lanches, qui tombaient environ toutes les h e u r e s ; la formation et la disso-
lution des nuages, et la succession des teintes du crépuscule, que M . Bravais
étudia sur le dôme du Goûté dans la soirée du 3o août. Les mêmes observa-
tions étaient faites aux mêmes instants à Chamouny par M. Camille Bravais,
et la comparaison des mêmes phénomènes, vus à une différence de niveau de
9 , 0 0 0 pieds, attirera peut-être l'attention des météorologistes.
      « Il y a peu d'objets à collecter dans ces régions glacées ; cependant ces
Messieurs rapportent des échantillons des roches qu'ils ont pu atteindre. Un
grand nombre sont vitrifiées ou même traversées comme le sable des tubes
iulminaires, par la foudre, qui frappe souvent ces sommets élevés. Ils oui
réuni aussi avec le plus grand soin toutes les espèces de plantes qui se trouvent
aux Grands-Mulets, rochers entourés de toutes parts par un immense glacier,
véritable oasis au milieu des neiges éternelles qui couvrent le Mont-Blanc. »
     Le W e t t e r h o r d , autre géant des Alpes, dont la hauteur est de rr,j/,.'V
pieds, a été escaladé, pour la première fois, le 28 août, par MM. Désor,
Dollfuss et Strengel.
     « L'ascension de M M . Bravais, Martins et Le Pileur est la trentième qui
ail réussi depuis l'année 1786, où la cime du Mont-Blanc fut atteinte pour
la première fois par le docteur Paccard de Chamonix, et non par le naturaliste
De Saussure, comme on le croit communément. Le nombre total des voyageurs
connus qui ont pris part à ces diverses ascensions est maintenant de quarante-
quatre, dont deux femmes. M^ e Dangeville est l'une des deux. »