Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
154                     L'ULTRAMONTANISME.
que peut aujourd'hui l'Eglise pour la civilisation Pbeaucoup, en tant
que chrétienne, absolument rien, en tant que romaine. C'est là uni-
quement ce qu'a cherché à prouver M. Quinet, et il y a une insigne
mauvaise foi à l'accuser d'annoncer un dogme nouveau.
    Toutes les grandes qualités du style de l'auteur du Génie des
Religions, l'ampleur, la clarté, le mouvement, se retrouvent dans
cette nouvelle œuvre au degré le plus remarquable, nous ne con-
naissons rien dans notre langue de plus éloquent que ces leçons ;
l'inspiration en est si pure, si sincère, si élevée, la forme si pleine
de chaleur et d'entraînement, c'est bien là une parole vraiment
religieuse ; nous en conserverons une impression ineffaçable. Une
chose nous séduit entre mille autres dans la pensée de M. Quinet,
c'est qu'avec un esprit aussi généralisateur, aussi universellement
humain, avec un sentiment puissant de l'unité et de la solidarité
de tous les peuples, il est animé de la nationalité la plus en-
thousiaste , de l'amour le plus ardent de la France. Par le temps
qui court on croit faire preuve de beaucoup de philosophie, en
préchant le cosmopolitisme, et voici un philosophe, un poëte resté
national. Personne n'a jamais parlé de la France mieux que lui ;
personne aujourd'hui n'en parle aussi bien. Puissions-nous l'entendre
quelque jour à une autre tribune. Pour terminer en laissant le lecteur
 sous l'impression de cette haute éloquence, nous citerons le passage
qui sert de réponse à un mot devenu célèbre d'un orateur ultra-
 montain.
    « Inutilement on espère par un dernier stratagème nous partager,
en divisant ce que l'on appelle les fils des croisés et les fils de Vol-
 taire ; personne de nous dans ce pays n'admet ces puériles distinc-
tions et cette primauté de race. Notre noblesse à tous est de la même
date, nous sommes tous les enfans des croisés. Seulement d'autres
jours sont venus ; les croisades du moyen âge sont finies ; ceux qui
reprennent ce chemin n'arrivent qu'à la mort.
    Le temps en est passé, car d'autres croisades ont commencé pour
les vivants, n'en avez-vous pas entendu parler? Les peuples pèlerins
se sont levés avec le siècle, à l'appel du Dieu des vivants, ils ont
semé aussi leur chemin de leurs os ; ils sont allés non pas à Antioche
ou à Nicée où il n'y avait rien à faire, mais là où Dieu voulait