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LULTRAMONTANISME. 145
fruit d'une haute intelligence consacrée dès longtemps à la philoso-
phie de l'histoire, il a le malheur d'arriver au milieu d'une polémi-
que dans laquelle amis et ennemis l'accueilleront comme un pam-
phlet. S'il a été pensé durant de longues années, si les jugements
qu'il renferme ont toute maturité, néanmoins il aura pu emprunter
de la lutte qui en a précipité l'éclosion, quelques uns de ces dé-
tails de forme dont la haine s'empare avec bonheur pour travestir
les idées et dénaturer les intentions. Il est dévoué de droit au fiel
des néo-catholiques, et, ce qui est pire encore, aux louanges inintel-
ligentes du vieux libéralisme. Chaque parti aura intérêt à l'amoin-
drir, et, pour y trouver des armes à la portée de ses petites pas-
sions, réduira ce grand discours sur l'histoire moderne aux di-
mensions d'un article de circonstance. On répète depuis longtemps
que la critique littéraire n'existe plus. L'absence complète de
critique serait moins fâcheuse que ces critiques systématiques, qui
ne partent même plus d'un large esprit de parti, mais d'un es-
prit de coterie dont l'intolérance s'accroît en raison de son exi-
guïté. Nous ne sommes certes pas à une époque de bien puissantes
convictions, et, cependant, telle et telle, secte parle constamment le
langage du fanatisme. Quelle amertume, quelle ironie envenimée,
quelle verve de haine dans le principal organe du néo-catholicisme,
le journal ['Univers! les feuilles des plus mauvais jours révolution-
naires sont égalées en violences, en injures, en personnalités bru-
tales par ces hommes qui ont la prétention d'être les seuls chrétiens.
La réaction soit disant religieuse a retourné contre la philosophie
le mot du XVIII e siècle, écrasons Vinfdme; et aujourd'hui, comme
autrefois, pour écraser l'infâme, les sarcasmes, les interprétations
perfides, le mensonge et la calomnie, tous les moyens sont bons et
sanctifiés par la sainteté du but. De la part des critiques de ce parti,
le livre à uVlIUramontanisme ne sera pas même l'objet d'un examen,
il sera étouffé sous quelques citations tronquées et quelques quoli-
bets. Si l'on se sentait assez fort pour suivre l'auteur sur le ter-
rain solide et calme où il s'est placé, il y aurait pourtant matière
à une bien grande et bien solennelle discussion. Mais de l'esprit de
M. de Maislre il n'est resté à son école que la violence et la pas-
sion, qui ont altéré toutes les œuvres de ce beau génie. Dans ce
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