page suivante »
66 CRITIQUE LITTÉRAIRE. sanl dans l'histoire, dans la science et partout, aux infini- ment petits échappés à la loupe de ses devanciers; tout aux causes perdues et aux paradoxes oubliés; déplorant, au profit des anciens patois de nos provinces, les empiétements de la langue française; se défendant avec une puérile obsti- nation de l'orthographe à la Voltaire ; professant un grand mépris, non pour les riens pompeux de la science, mais pour les grandes vues métaphysiques dont il se rit parfois comme de paroles sonores et vaines. L'homme ne se manifestait donc point par celte tendance, c'était simplement, dans l'artiste une erreur de goût ; aussi la nature ne parle pas : il y a comme une recherche, un parti pris d'indélébile amer- tume, mais à chaque instant l'auteur se monte à un ton de tristesse trop haut pour être juste. Depuis 1803 où il avait écrit le Peintre de Salzbourg, jusqu'en 1820, JeanSbogar, Thérèse Aubert, Adèle se succédèrent malgré quelques em- barras politiques, une active coopération à la rédaction des Débats et d'intéressants travaux de linguistique. Dans tous ces romans, même penchant au désillusionnement démenti par je ne sais quel tour ingénieux dans l'esprit et même par la facture travaillée du style. Je ne puis le cacher, je n'aime pas cette douleur de plume : il n'y a que les larmes vraies qui me fassent pleurer : les désespoirs d'imagination, me- surés pour l'effet dramatique, ne me touchent point. Si nous voulions apprécier chacun de ces petits romans en détail, il nous faudrait reconnaître que l'invention des événements y tient peu de place, aussi bien que la création des caractères. Jean Sbogar est une assez vulgaire histoire pe brigand amoureux d'une jeune fille riche et noble, ni Antonia, ni Mme Aldini, ni Jean Sbogar lui-même ne sortent des figures communes du roman. Adèle, dont l'intrigue mieux tissue se noue plus fortement, ne laisse cependant, après la lecture, aucun souvenir d'un personnage vivement tracé,