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                           NÉCROLOGIE.                            409
   Au milieu de la grand'rue on voyait cependant et l'on voit en-
core aujourd'hui une modeste habitation dont les fenêtres au rez-
de-chaussée étaient ornées des marchandises les plus diverses.
Jouets d'enfant, livres de piété, images de dévotion, sollicitaient
l'attention du passant et laissaient apercevoir plus loin des appro-
visionnements de mercerie, de quincaillerie, de denrées colo-
niales et de tous les produits indispensables à une population
même la plus simple dans ses désirs.
   Là, vivait un ménage estimé de tous : le père, bon et simple
marchand, la mère, femme active, pieuse, toute à son commerce
qu'elle avait fait prospérer, et deux enfants, un garçon et une
fille, c'est ce jeune garçon qui est notre héros.
   Né le 11 octobre 1806, Benoît Hugues ne se fit remarquer, pen-
dantles premières années de sa jeunesse, que par un amour extrême
et insurmontable pour la flânerie, les courses dans les bois et dans
les champs et une répugnance peu commune pour l'étude et le
travail. Cette nature inculte et rêveuse s'accommodait mal de la
régularité de la classe et de l'aridité des leçons. Le maître d'école,
le bon M. Béard, prétendait qu'il avait peu d'élèves aussi pares-
seux dans tous ceux que la commune lui confiait; le fait est que
le jeune Hugues préférait de beaucoup les rêveries du haut des
remparts du château ou les courses le long des bords sinueux de
l'Albarine, les oiseaux dénichés dans les bois ou un beau coucher
de soleil, contemplé là bas derrière les arbres de la rivière d'Ain,
à tout ce que pouvait enseigner un pauvre magister de village.
Remontrances de sa bonne mère, corrections du maître ou du père,
hélas ! rien n'y faisait ; le jeune poète en herbe semblait avoir fait
le voeu de ne rien savoir et souvent les fortes têtes du pays avaient
prédit que cet enfant ne serait bon à rien.

  En 1819, l'écolier paresseux et vagabond fut envoyé au petit
séminaire de Meximieux où il sembla prendre à tâche de soutenir
sa réputation. Puni par ses professeurs, il trouva dans la poésie
une arme redoutable dont il se servit pour se défendre ou se ven-
ger ; ce talent gracieux, harmonieux et rêveur se révéla par des
satires, des couplets faciles, mais empreints de plus de raillerie